Permettez-moi de compléter ce qui vient d'être dit. Je ne pense pas que la majorité soit comme M. Jourdain et fasse de l'austérité sans le savoir : elle sait qu'elle en fait, mais elle lui donne simplement un autre nom. La preuve : hier soir dans l'hémicycle, à l'adresse des Républicains, et ce matin sur France Info, à l'adresse d'Édouard Philippe, Bruno Le Maire s'est servi des propos que j'avais tenus pour souligner le sérieux du Gouvernement. Là où j'ai parlé d'austérité, lui a dit que le Gouvernement présentait la stratégie de rétablissement des finances publiques la plus crédible depuis vingt ans – ce sont ses mots. Si la plus grande maîtrise des dépenses publiques depuis vingt ans, ce n'est pas de l'austérité, alors dites-moi comment qualifier votre budget ! Je l'ai répété hier : lorsque vous augmentez les dépenses publiques de 0,6 point alors qu'une augmentation de 1,35 point serait nécessaire pour répondre aux besoins des Français et tenir compte de l'augmentation de la population, vous menez une politique d'austérité à hauteur de 30 milliards d'euros. Et celle-ci sera d'autant plus redoutable en cas de récession l'an prochain – c'est ce que je crains et non ce que j'espère, monsieur le ministre délégué, mais on ne peut pas se fonder sur des prévisions basées sur des espoirs et sur la méthode Coué. Je vous rappelle que lorsque j'affirmais ici même cet été, au sujet de votre programme de stabilité, que votre prévision de croissance de 1,4 % pour 2023 était très optimiste, vous me faisiez à peu près la même réponse qu'aujourd'hui – depuis, vous avez rectifié votre prévision.
Je n'y peux rien si le FMI et à peu près toutes les institutions internationales envisagent, pour les pays industrialisés, un risque de récession grave l'an prochain, très éloigné de la croissance de 1 % que vous prévoyez désormais. D'autant plus que, comme vient de le dire mon collègue David Guiraud, vous tenez compte dans vos prévisions de la réforme des retraites dont vous m'aviez dit, au moment des dialogues de Bercy, que vous n'imaginiez pas qu'elle puisse influer sur la croissance l'an prochain. En cas de récession, la baisse des dépenses publiques sera encore plus lourde à supporter. Or c'est bien une telle baisse que vous prévoyez pour les cinq prochaines années. Au moins, assumez ce choix : vous pensez que c'est ainsi que l'on pourra relancer l'économie et faire face à la crise, alors que nous vous disons l'inverse. Ne vous drapez pas derrière les termes en remplaçant « austérité » par « maîtrise de la dépense publique ».