On peut s'étonner qu'une partie des membres de l'hémicycle s'opposent à la règle de la majorité qualifiée – qui est pourtant une des basses du fonctionnement de l'Union européenne – alors même qu'ils regrettent habituellement de ne pouvoir obtenir des avancées significatives en matière de fiscalité et de taxation, par exemple, au motif que la règle de l'unanimité bloque le processus.
Ajoutons également qu'un grand État membre, comme la France, a plutôt intérêt au passage à la majorité qualifiée. Au Parlement européen, le poids démographique d'un pays lui permet de servir ses intérêts, bien mieux qu'au Conseil. Prenons l'exemple du nucléaire : dernièrement, à l'issue d'une bataille au Parlement européen, nous avons réussi à faire admettre, grâce à une coalition formée avec de nombreux pays d'Europe centrale et du Nord, que le nucléaire était une énergie verte. Cela a pris du temps, mais nous disposions d'un avantage que nous n'aurions certainement pas eu au Conseil.
Pour rebondir sur les propos du président et rapporteur Jean-Louis Bourlanges, l'Europe a surtout effectué un grand bond démocratique grâce au passage à la majorité qualifiée. Au temps des diètes, des coalitions ou des traités, tels celui de Westphalie, qu'on nous vend depuis quatre siècles, les accords internationaux étaient obtenus à l'unanimité. Depuis le traité de Rome puis, à partir de 1986, la signature de l'Acte unique européen, les pères fondateurs ont permis d'accomplir un bond démocratique, le passage à un vote. Il a permis d'exprimer à quel point l'Europe est notre avenir, un avenir démocratique, celui de l'État de droit.