Merci Mme la Présidente. Je tiens à remercier sincèrement tous mes collègues qui se sont exprimés, ce qui montre tout l'intérêt que notre Commission porte à ce sujet essentiel. Au Parlement européen, les Commissions « Libertés civiles, justice et affaires intérieures » (LIBE), « Marché intérieur et protection des consommateurs » (IMCO) se sont penchées ces derniers mois sur le projet d'acte européen. Il me semblait nécessaire que notre Commission contribue à son tour à cette réflexion collective. Si j'en juge par la qualité et la diversité de vos interventions, nous tenons tout à fait notre rang et c'est heureux.
Je souhaite remercier Mme Laurence Cristol non seulement pour le soutien qu'elle apporte à ce projet d'avis politique mais aussi pour le discours qu'elle tient sur la nécessité vitale pour l'Union européenne de soutenir l'innovation et la recherche. Vous l'avez souligné, le défi qui est le nôtre est de trouver un équilibre entre le nécessaire soutien à l'innovation et la garantie de notre sécurité commune. La ligne de crête sur laquelle nous nous trouvons est étroite, mais il me semble que cet équilibre essentiel est pour l'heure garanti par le projet d'acte européen.
M. Alexandre Sabatou, il est important que notre Commission s'empare de ce sujet stratégique au moment où nous pouvons encore faire passer des messages auprès de nos collègues de l'exécutif et du Parlement européen. Il me semble que tenter d'introduire des règles de bonne gouvernance, qui garantiront le respect de nos valeurs dans l'usage de cette nouvelle technologie, ne porte pas préjudice à l'innovation. Certes, d'autres régions du monde n'ont que faire de la gouvernance ou de la protection des données personnelles. Mais l'Union européenne, et c'est d'ailleurs l'esprit du RGPD, peut en tirer un avantage compétitif.
Quant aux montants des investissements européens en matière de numérique et plus spécifiquement d'intelligence artificielle, ils sont tout à fait conséquents. Evidemment, il est toujours possible de faire mieux, et il serait heureux que de nouvelles ressources propres y soient consacrées. Encore faut-il pour cela soutenir et encourager une approche européenne concertée.
M. Manuel Bompard, je note avec satisfaction que vous soutenez les efforts de régulation de l'Union européenne, qui nous permettront de faire prévaloir nos valeurs fondamentales et notre espace de droit. Je pense avoir suffisamment relayé dans cet avis politique les inquiétudes soulevées par l'intelligence artificielle. Cependant, j'ai également voulu porter un message optimiste et favorable à l'innovation et au progrès. Je souhaite que dans certains domaines régaliens, l'usage de l'intelligence artificielle à des fins répressives s'effectue sous le contrôle des autorités judiciaires, en privilégiant une approche pragmatique. Nous y reviendrons sans doute lors de l'examen des amendements.
Je remercie M. Vincent Seitlinger pour ses commentaires élogieux. Je jure ne pas avoir eu recours à l'intelligence artificielle dans la rédaction de ce rapport. Je partage votre souhait de garantir que nos efforts de régulation ne se traduisent pas par des contraintes excessives. Ce serait contre-productif. C'est pour cette raison que la démarche par risques proposée par M. Thierry Breton est pertinente. Lorsque le risque est faible, les obligations sont réduites. Vous avez eu raison de le souligner, la confiance est essentielle dans ce domaine. S'agissant des données abritées par les Etats tiers, le RGPD s'applique aujourd'hui. Concernant l'utilisation de l'intelligence artificielle, les entreprises qui opèrent sur le territoire européen devraient à terme en respecter la réglementation, quelle que soit leur nationalité. On le voit aujourd'hui sur le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA), l'application des règles est un combat. Mais il vaut la peine d'être mené.
Mme la Présidente, je vous remercie d'avoir réservé un accueil favorable sur le principe à ce projet d'avis politique. Je suis consciente d'avoir été dans l'obligation de traiter de nombreux enjeux sans pouvoir toujours approfondir, mais je vous renvoie aux travaux de grande qualité des parlementaires européens si vous souhaitez creuser certains points. Vous l'avez dit, la question de la définition est cruciale. Nous sommes sur le point d'aboutir à une définition dans le cadre des travaux de l'OCDE, définition qui pourrait être intégrée au corpus européen.
Par ailleurs, je crois que nous n'en avons pas encore parlé mais, dans l'avis politique, j'ai souhaité introduire l'idée d'une clause de revoyure, une espèce de bordage dans le temps car je suis consciente qu'il existe un risque que face à l'avancée des IA, les régulations finissent par accumuler du retard. Nous devrons pouvoir nous assurer que nous sommes capables de faire prévaloir les choix politiques que nous avons faits. Il faudra certainement remettre l'ouvrage sur le métier. Vous avez pointé, Mme la Présidente, la question des droits humains, la Charte des droits fondamentaux et notre corpus juridique en général. Vous avez raison, c'est absolument essentiel et cela fait de l'espace européen un espace démocratique distinct de nombre d'autres régions. Il faut trouver un équilibre en adéquation avec cette question.
Mme Brigitte Klinkert, vous avez parlé de l'impact des IA génératives sur le respect des droits d'auteur. Cette question est bien présente à l'esprit des députés européens et a été discutée en commission culture et des dispositifs sont introduits à cet effet. À ce stade, nous avons rencontré des juristes qui travaillent sur la propriété intellectuelle dans les comités mis en place par le ministre Bruno Le Maire et Mme la Première ministre, et ils nous assurent que le texte européen, s'il aboutit dans sa forme actuelle, sera parfaitement compatible avec le respect de la directive sur le droit d'auteur. Là aussi une clause de revoyure serait souhaitable car les enjeux économiques et en termes d'emplois pour le secteur culturel sont lourds.
Concernant la question de M. Charles Sitzenstuhl, l'expression « bac à sable » est une traduction de « sandbox ». Comme l'indique le texte du projet de règlement, les sandboxes sont un espace de dérogation possible à la régulation. C'est un règlement qui prévoit dans son corpus de dispositions les dérogations possibles à titre temporaire pour les états qui le souhaiteraient pour soutenir l'innovation et la recherche. C'est un dispositif d'expérimentation auquel notre exécutif est très attaché tout comme d'autres États européens en accord avec les autorités nationales de contrôle. Nous pouvons peut-être remplacer « sandboxes » par dispositifs d'expérimentation.