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Intervention de Gabriel Attal

Séance en hémicycle du lundi 10 octobre 2022 à 21h30
Débat sur la dette

Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics :

Je rappelle néanmoins que la signature de la France inspire toujours une très grande confiance, notamment aux agences de notation : la majorité d'entre elles accordent actuellement à notre pays la note de long terme AA. Si les notations sont demeurées stables, la fin des achats nets de la Banque centrale européenne (BCE), qui tendaient à comprimer les écarts de taux entre États, a en revanche entraîné une hausse de ces derniers. Depuis le début de l'année, ils sont ainsi passés de quarante à cinquante-cinq points de base avec l'Allemagne, de moins quarante à moins cinquante points avec l'Espagne – la France affichant des taux d'intérêt plus bas que l'Espagne – et de – 100 à – 160 points de base avec l'Italie.

La politique de gestion de la dette ne consiste pas seulement à rechercher les meilleurs taux, mais aussi à innover pour en faire un levier de développement de la finance durable. C'est ce que nous faisons grâce aux obligations vertes. Depuis 2017, la France a progressivement élargi son offre de titres verts, afin de répondre à une demande toujours croissante. À la fin du mois de septembre 2022, l'encours total de titres verts atteint ainsi 52 milliards d'euros, faisant de la France le premier émetteur souverain de titres verts. Concrètement, ces titres permettent de lever des fonds alloués à des dépenses favorables à l'environnement – c'est-à-dire à l'atténuation du changement climatique, à l'adaptation à celui-ci, à la promotion de la biodiversité ou à la lutte contre la pollution. Grâce à son leadership en matière d'émission d'obligations vertes, la France agit puissamment pour orienter les financements vers la lutte contre le réchauffement climatique. C'est évidemment un motif de fierté, mais aussi un domaine dans lequel nous comptons intensifier encore nos efforts.

Je profite d'ailleurs de ce débat pour saluer à nouveau l'expertise de l'Agence France Trésor (AFT) et le travail remarquable de ses agents qui ont su, au cours des années, mener à bien une stratégie de diversification des investisseurs et rendre notre dette plus sûre, donc contribuer à notre souveraineté.

J'en viens à la question centrale : celle de la soutenabilité de la dette publique. L'apprécier implique de connaître la charge qu'elle va représenter pour nos finances publiques, donc d'établir des scénarios concernant l'évolution des taux d'intérêt. Le scénario retenu pour la fin 2022 et pour 2023 repose sur l'hypothèse d'une remontée des taux longs : le taux à dix ans s'élèverait à 2,5 % à la fin 2022 et à 2,6 % à la fin 2023. Les taux à dix ans convergeraient, à moyen terme, au-delà de 3 %. Pour 2023, les taux directeurs continueraient de croître, tandis que les taux des bons du Trésor à taux fixe à trois mois augmenteraient fortement, passant de 1,2 % à la fin 2022 à 2,1 % à la fin 2023.

Une remontée durable des taux d'intérêt au-delà des hypothèses du scénario de référence constituerait un facteur d'augmentation progressive de la charge de la dette. Selon le scénario que nous avons retenu, qui est le scénario central figurant dans le projet de loi de programmation des finances publiques, la charge de la dette atteindrait 60 milliards d'euros à l'horizon 2027. Dans le rapport annexé au texte figurent les autres scénarios envisagés en fonction de l'évolution à la hausse ou à la baisse des taux d'intérêt. Si les taux d'intérêt augmentaient de deux points de plus que dans le scénario de référence, atteignant les niveaux auxquels la France empruntait au début des années 2000, la charge de la dette s'établirait à 94 milliards d'euros à la fin du quinquennat.

Cette projection conduit à une conclusion : la France doit s'inscrire dans une trajectoire de maîtrise des dépenses publiques. Un pays présente des finances publiques soutenables lorsqu'il est capable de faire face à ses obligations financières de long terme à politique constante, autrement dit si la trajectoire de dette reste contenue à long terme sans avoir à prendre des mesures additionnelles de réduction des dépenses ou de hausses des recettes.

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