Je représente ici l'Union nationale des producteurs de pommes de terre, mais je suis aussi président du groupe de travail sur la filière pomme de terre initié par le Comité des organisations professionnelles agricoles de l'Union européenne et la Confédération générale des coopératives agricoles (Copa-Cogeca). Cette fonction m'apporte une vision transversale.
Je m'associe à l'ensemble des remarques formulées par mes collègues dans cette enceinte. En France, la filière pomme de terre représente une production de plus de 8 millions de tonnes. Je précise que cette filière regroupe l'ensemble des segments : plants, primeurs, produits frais, industrie ou fécule.
Je rappelle que la pomme de terre reste le premier aliment des Français, avec une consommation de 54 kilos par an et par habitant. Ce produit est donc nécessaire à notre alimentation. La France compte plus de 17 000 producteurs de pommes de terre, pour une surface totale de 210 000 hectares et un chiffre d'affaires global de 3,5 milliards d'euros.
Je constate qu'il est demandé aujourd'hui à la production de mener sa révolution agricole, alors que pendant trente ans la priorité était de produire et de nourrir la population. À l'époque, la prise de conscience des enjeux climatiques n'était pas à la hauteur du sujet. Or, dix ans seulement nous sont accordés pour réaliser cette révolution. Il faut pourtant compter une quinzaine d'années pour trouver une nouvelle variété de pomme de terre, la produire et la mettre sur le marché. Le premier paradoxe des politiques publiques tient donc au fait qu'il est demandé à l'agriculture d'avancer plus vite que le temps de la recherche et de l'application à la nature.
La préservation de l'environnement ne se décrète pas. Ce n'est pas un dogme, mais une réalité pragmatique, et personne n'est mieux placé que les agriculteurs pour identifier les effets du changement climatique sur l'environnement. Je rappelle qu'en 2022, le rendement de la production de pomme de terre au niveau européen – et plus encore français – a été catastrophique. Les cours se sont envolés, alors que la production était très faible.
La demande en pomme de terre à l'échelle européenne connaît une croissance de 2 à 3 % par an, ce qui implique l'aménagement de 20 000 hectares supplémentaires en France chaque année. Il nous faut convaincre les nouvelles générations de contribuer à cette dynamique de production tout en libérant ces surfaces supplémentaires.
Puisque la souveraineté alimentaire et industrielle est au centre des préoccupations, les politiques agricoles et environnementales doivent être ajustées en conséquence. En plus des exigences de gestion des risques, il nous est demandé de décarboner nos pratiques. Or, la suppression de solutions chimiques implique des alternatives mécaniques, dont l'impact sur le climat pourrait être plus défavorable que celui des produits phytosanitaires, en raison des émissions de gaz à effet de serre.