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Intervention de Véronique Louwagie

Séance en hémicycle du lundi 10 octobre 2022 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Louwagie :

Ce budget ne répond pas non plus aux urgences que nous devons affronter dès aujourd'hui, alors qu'une inflation sans précédent depuis quarante ans mine le pouvoir d'achat de nos compatriotes. De la même manière, nos entreprises et nos collectivités sont étranglées par des prix de l'énergie devenus totalement fous, faute de volontarisme politique de la part du Président de la République.

Pour le reste, ce projet de loi de finances ne prépare en rien aux défis majeurs que nous devrons relever et aux priorités que nous devons nous fixer pour les cinq prochaines années : je pense en particulier à la question fondamentale du financement de la transition énergétique, ou encore à l'enjeu majeur de notre souveraineté économique.

La principale leçon de ce budget est que le Gouvernement se désintéresse totalement du rétablissement de nos finances publiques. Cela n'avait jamais été l'une des principales priorités de la précédente majorité : elle figure désormais au dernier rang de celles-ci, alors que les comptes passent dans le rouge, et même au rouge écarlate.

La France affiche un taux de dépenses record, mais les dépenses courantes vont encore augmenter de 62 milliards d'euros, et 11 000 fonctionnaires supplémentaires vont être recrutés.

La France fait partie du quinté des pays les plus endettés d'Europe, avec une dette qui dépassera bientôt les 3 000 milliards d'euros, tandis que notre déficit se creusera encore de 155 milliards. Au total, un tiers de nos dépenses sont désormais financées par la dette, donc par les générations futures.

La charge de la dette tutoie les 60 milliards d'euros et va devenir le premier budget de l'État après l'éducation nationale. Au moment même où les taux d'intérêt remontent, voire dépassent les 2,5 %, la France va emprunter 270 milliards d'euros sur les marchés, un record absolu.

Pour compléter ce tableau édifiant, la France affiche un déficit commercial record de 150 milliards d'euros alors que la récession menace.

Enfin, la France reste le pays d'Europe, après le Danemark, où les taxes et les impôts sont les plus élevés d'Europe.

Vous retenez pour 2023 une prévision de croissance de 1 % que tous les instituts, et le Haut Conseil des finances publiques lui-même, jugent irréaliste. Vous vous réfugiez derrière ces hypothèses avantageuses pour sauver tant bien que mal la face, mais, même avec vos prévisions intenables, la France décroche ; nous sommes relégués parmi les pires élèves de l'Europe, ceux dont les comptes sont dans la situation la plus critique, ceux qui sont à la merci de leurs créanciers et pourraient, demain, être attaqués. Le retour à un déficit à 3 % du PIB n'est prévu qu'à l'horizon 2027, ce qui fait que nous serions le dernier pays de l'Europe à l'atteindre.

Le fond du problème, monsieur le ministre, ce qui pourrait nous mettre en difficulté vis-à-vis de nos voisins européens, ce n'est pas le rejet probable de votre loi de programmation, c'est son contenu même, qui ne traduit aucun réel effort de désendettement. J'en profite pour répondre à Mathieu Lefèvre que la loi de programmation peut être entièrement réécrite au Sénat et que, si le Gouvernement tient tant à ce que nous la votions, il peut la réécrire lui-même pour la rendre beaucoup plus ambitieuse.

En l'état, Gilles Carrez, que Mathieu Lefèvre présente comme son mentor, aurait été le premier à la combattre. Pourquoi ? Parce que nous sommes devenus les tristes protagonistes d'une fable dans laquelle la rigoureuse fourmi du nord déplore le manque de prévoyance de la cigale française, cigale qui se trouve déjà fort dépourvue mais qui veut manifestement continuer de chanter tout l'été.

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