Intervention de William Martinet

Réunion du mercredi 15 novembre 2023 à 15h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaWilliam Martinet, rapporteur :

Si nous n'avons pas fait usage du droit de tirage pour créer cette commission d'enquête, c'est bien parce que nous nous inscrivons dans une démarche transpartisane.

Vous avez compris mon opinion et celle de mon groupe sur la marchandisation de la petite enfance. Ce secteur, comme le grand âge, l'éducation ou encore la santé, devrait être préservé des appétits lucratifs. De votre côté, vous avez le droit de penser qu'une marchandisation heureuse de la petite enfance est possible et qu'un fonds d'investissement peut prendre en considération l'intérêt général et s'autolimiter pour ne pas dégrader les conditions d'accueil dans les crèches. La commission d'enquête n'a pas vocation à trancher. Grâce aux moyens d'investigation dont elle dispose, elle nous permettra de confronter nos points de vue.

Oubliez l'avis du rapporteur et considérez la commission d'enquête pour ce qu'elle est : un outil à la disposition de la représentation nationale pour faire son travail. Alors que les pouvoirs des parlementaires sont malheureusement de plus en plus limités – il est devenu difficile d'amender la loi et de la voter –, essayons de conserver celui d'enquêter.

S'agissant du secteur privé lucratif, ce n'est pas stigmatiser que de s'interroger sur la cohabitation entre la recherche de lucrativité et la prise en charge de publics vulnérables.

Je fais référence aux établissements privés lucratifs car des éléments objectifs nous incitent à enquêter. « Nous avons été confrontés depuis quelques années à des montages d'opérateurs individuels privés maximisant leur patrimoine à l'aide des généreuses subventions de la CAF » : qui porte une telle accusation ? Le conseil d'administration de la CAF d'Ille-et-Vilaine. Il y a là matière à creuser, c'est ce que nous vous proposons.

Nous ne sommes pas responsables du manque de confiance à l'égard des gestionnaires privés de crèches. La confiance a été rompue à cause des maltraitances révélées. Le fait d'enterrer l'affaire en refusant de créer une commission d'enquête n'est pas de nature à la rétablir. En revanche, la transparence à laquelle la commission contribue est le meilleur moyen de le faire.

Madame Peyron, vous avez évoqué les propositions de la mission « flash ». J'en ai repris plusieurs sous forme d'amendements au projet de loi pour le plein emploi. La majorité les a rejetés. Je me réjouis d'un changement de position de sa part. Comme l'a dit Hadrien Clouet, qu'est-ce qui empêche le Gouvernement de déposer demain un projet de loi pour mettre en place le plus vite possible ces mesures, qui s'adressent à toutes les crèches, quel qu'en soit le gestionnaire ? Rien. Lancez-vous et nous les soutiendrons. Mais cela ne résout aucunement les problèmes de l'opacité et de la financiarisation des crèches privées lucratives.

Depuis le rapport de l'Igas, nous connaissons la surface émergée de l'iceberg. Il nous manque encore la surface immergée. Or nous avons besoin de savoir pour instaurer une régulation efficace du secteur privé lucratif. Malheureusement, la mission « flash », aussi intéressante soit-elle, n'a pas permis, faute de temps et de moyens, d'ouvrir la boîte noire des grands groupes de crèches privées lucratives.

J'en reviens à mon point de départ. S'il faut accepter certaines propositions, notamment du groupe Les Républicains, en la personne de M. Bazin, pour que la proposition de résolution soit transpartisane comme nous le souhaitons, pourquoi pas ? Je serai ainsi favorable aux amendements visant à reformuler de manière plus équilibrée et moins accusatrice les missions de la commission d'enquête et à en élargir le périmètre. En revanche, je m'opposerai aux amendements susceptibles de limiter les capacités d'investigation de la commission sur des points sensibles.

J'espère que nous pourrons ainsi avancer et lancer cette commission d'enquête parlementaire.

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