Merci, madame la présidente, de m'accueillir dans cette commission même si, après l'engagement de la responsabilité du Gouvernement hier, cette réunion prend un sens un peu étrange. Cette situation met en difficulté les députés mais aussi les services de l'Assemblée, qui doivent s'adapter de façon permanente à vos articles 49, alinéa 3.
J'axerai mon propos sur le programme 304 et plus particulièrement sur la protection de l'enfance, dont vous avez peu – voire pas du tout – parlé, madame la rapporteure pour avis. Ce programme illustre parfaitement l'écart qui existe entre le discours politique de la majorité relative, du Président et du Gouvernement, et ce qui se passe en réalité : il existe un énorme fossé entre la communication et les actes. Il y a quelques semaines, alors que je travaillais sur le « bleu » budgétaire, j'ai eu la très mauvaise surprise de découvrir que le budget de la protection de l'enfance serait en baisse en 2024. J'espère que vous savez pourtant que ce secteur s'effondre littéralement, qu'il n'est plus en capacité de fonctionner correctement. Dans ces conditions, lui retirer le moindre euro est inacceptable.
Nous nous sommes efforcés de proposer, lors des discussions budgétaires, des solutions de financement d'urgence pour remédier à la pénurie de professionnels et à la non-exécution des mesures. C'est d'ailleurs ce que demande le Conseil national de la protection de l'enfance, une instance dont je rappelle qu'elle est rattachée au Gouvernement. Nous avons rédigé des amendements dont nous aurions aimé discuter avec vous aujourd'hui, par exemple au sujet de la prime Ségur. Vous devez savoir en effet que les professions les plus précaires du secteur social et médico-social sont encore exclues des mesures du Ségur. On entend souvent parler de crise d'attractivité dans ces métiers ; Emmanuel Macron lui-même avait évoqué, pendant la crise du covid, ces métiers « que nos économies rémunèrent si mal ». Pourtant, vous rejetez les solutions que nous proposons, comme ce fut le cas il y a quinze jours en commission des finances.
D'autres de nos amendements concernaient la prise en charge par l'État des revalorisations salariales adoptées en 2022 : vous n'ignorez pas que les départements sont en difficulté et qu'ils ont besoin d'un engagement plus fort de l'État, pour financer la protection de l'enfance notamment. Nous avons également travaillé à des propositions concernant le numéro d'appel d'urgence pour les enfants en danger ou maltraités, le 119. Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance, a raison de faire la promotion de ce numéro qui est d'une importance majeure. Encore faudrait-il qu'il fonctionne correctement. Or le temps d'attente est tellement long que bien souvent, les enfants souhaitant signaler une maltraitance raccrochent avant d'avoir pu parler à quelqu'un. C'est très grave, car un enfant ne demande de l'aide qu'une seule fois, pas deux. Pourtant, vous avez voté contre les revalorisations salariales que nous avons proposées pour les agents du 119.
Le seul amendement que notre groupe est parvenu à faire adopter en commission des finances n'a pas été retenu dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité. Il concerne le prolongement de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise). Il est très grave, alors que Charlotte Caubel vient de lancer une campagne contre l'inceste, que les financements destinés à l'instance référente sur ce sujet disparaissent.