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Intervention de Patrick Karam

Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 14h00
Commission d'enquête relative à l'identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif ayant délégation de service public

Patrick Karam, vice-président du Conseil régional d'Île-de-France, co-auteur de Le Livre noir du sport : violences sexuelles, homophobie, paris truqués, racisme, radicalisation… Tout ce qu'on ne dit jamais :

Là, nous parlons de l'homophobie. Laissez-moi terminer sur ce sujet. Je vais lister un certain nombre de choses, puis nous répondrons à vos questions. Si je réponds à vos questions au fur et à mesure, je vais perdre le fil de mon développement. Le vrai sujet aujourd'hui, c'est l'homophobie au quotidien.

En sachant que des jeunes se suicident. Je précise que l'homophobie est moins violente en ce qui concerne les filles, même si elle leur porte préjudice. Parfois, une jeune fille le ressent de manière très frontale et très violente. Pour autant, il y a une forme de tolérance en la matière. En revanche, en ce qui concerne les garçons, c'est de la violence qui s'exprime. C'est l'exclusion du groupe social.

Je prends l'exemple d'un garçon qui a été dans un club toute sa vie et qui y a des amis. Il fait des sorties avec eux. À l'adolescence, son orientation sexuelle se fait plus marquée. Il est tout de suite mis dans une posture d'accusé. Si jamais son orientation sexuelle est découverte, il n'a plus sa place dans le clan. C'est extrêmement violent dans les sports collectifs. L'épreuve de la douche et du vestiaire est extrêmement traumatisante. Il arrive souvent que certains d'entre eux finissent par quitter le club, voire se suicider.

Le taux de suicide est extrêmement important. Il y a un phénomène de passage à l'acte. Le nombre d'études documentées n'est peut-être pas suffisant en la matière. Ça nécessite un vrai travail d'expert parce qu'il y a mille raisons de passer à l'acte lorsqu'on est adolescent. Cette raison-là me paraît extrêmement importante. Ce passage à l'acte est lié au fait d'avoir quitté son groupe. Parfois, il y a même des coming out forcés avec les parents. Ce sujet est vraiment central.

Je le dis de manière très solennelle : nous pourrions adapter et décliner les outils que l'État a mis en place pour la lutte contre les violences sexuelles dans le champ de l'homophobie. Or, ce n'est pas fait. On n'a pas mesuré le poids, la portée, les implications et les conséquences de l'homophobie dans le sport au quotidien. Les réflexions homophobes qui lui sont faites marquent un jeune.

Que fait-il pour se protéger ? Il a deux solutions : soit il explose, il finit par tout lâcher, s'enferme et sa vie devient difficile ; soit il décide de faire de la surenchère en jouant davantage à l'homophobe. Magali a cité un certain nombre d'exemples dans l'ouvrage.

Concernant l'homophobie, je considère donc que rien n'est réglé. Au-delà de quelques banderoles, il y a tout ce qui se passe au quotidien et qui a des conséquences tragiques sur des jeunes. À un moment donné, il va falloir que cette question-là soit réglée. Il s'agit de mettre en place des outils.

Il y a également la question de la religion et des phénomènes extrêmes dans le sport. Il peut s'agir de phénomènes d'extrême droite ou liés à la religion et son impact dans le sport. Ça peut aller jusqu'à des atteintes aux valeurs de la laïcité et de la République. Je ne veux pas confondre ces atteintes-là avec les phénomènes de radicalisation. Il ne faut pas confondre les deux et ne pas les confondre non plus avec le communautarisme, même s'il existe certaines passerelles.

Lorsque Daesh est arrivé en 2014, ils demandaient à s'inscrire dans des clubs de sport. Ça concernait notamment le football mais surtout des sports de combat. Ils souhaitaient s'inscrire pour se former. À cette époque-là, il y avait effectivement des fichiers de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste. Des radicalisés s'étaient effectivement inscrits. Ça a été très suivi par toutes les cellules qui travaillaient sur cette question du sport et de la radicalisation.

S'il y a un pas à ne jamais franchir, c'est de considérer une fille qui porte le voile comme étant radicalisée. Par contre, refuser de serrer la main des garçons, quitter son groupe, tenir des propos complotistes et commencer à appeler à la haine constituent des faisceaux d'indices qui montrent un basculement vers la radicalisation. Il faut donc être très attentif. Ça requiert une formation très pointue pour ceux qui analysent le sujet au sein des fédérations.

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