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Intervention de Patrick Karam

Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 14h00
Commission d'enquête relative à l'identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif ayant délégation de service public

Patrick Karam, vice-président du Conseil régional d'Île-de-France, co-auteur de Le Livre noir du sport : violences sexuelles, homophobie, paris truqués, racisme, radicalisation… Tout ce qu'on ne dit jamais :

Pourquoi ai-je choisi de dédier au sport ma carrière administrative, mon métier et mon mandat ? Au-delà de mon amour pour le sport, je considère que le sport est un outil extraordinairement puissant pour rassembler, donner des cadres et sauver des jeunes.

À titre personnel, mon père ne parle que le créole et l'arabe. En Guadeloupe, je me battais tous les jours dans la rue. J'ai été docteur en sciences politiques et délégué interministériel. J'ai eu une carrière administrative et j'ai un mandat en même temps. Si je suis ce que je suis, c'est parce que j'ai rencontré au karaté un sensei qui m'a remis sur le droit chemin. Le sport répare. Il ne faut pas oublier que vous avez des bénévoles qui y consacrent leurs journées, leurs nuits et leur temps. Il me semblait important de préciser le contexte de mon intervention et de mon engagement.

Magali Lacroze a raison : il y a un sujet sur le sport. Nous voyons des témoignages sortir depuis plusieurs années. Ils font la une de l'actualité, puis ils retombent. En revanche, dans le monde anglo-saxon, on constate que ces témoignages-là portent des politiques publiques, ce qui n'est pas le cas en France. Je voudrais lister quelques questions qui me semblent extrêmement importantes.

Dans ce livre, il est notamment question de sexisme et de tout ce qui peut s'y apparenter. Nous avons également parlé de violences sexuelles. Ce sujet demeure central. Le ministère a mis en place des outils, et en particulier le contrôle de l'honorabilité qui descend jusqu'aux bénévoles. Des individus sont écartés des clubs. On peut parfois changer un nom afin de ne pas être reconnu dans le logiciel. Mais globalement, ça fonctionne. À l'intérieur du champ des fédérations, il y a des formations spécifiques.

Je pense notamment à une association extraordinaire qui s'appelle Colosse aux pieds d'argile. Pour le coup, elle a soulevé un certain nombre de tabous. D'ailleurs, ce n'est pas la seule association à l'avoir fait. C'est important parce que ça met les uns et les autres en état de choc. Lorsqu'ils interviennent, la parole se libère, comme j'ai pu le constater dans un CREPS. En sachant que la parole ne peut se libérer que s'il y a de la confiance.

Il est vrai qu'il y a une sorte d'omerta. Elle a été très forte et très puissante. Elle existe toujours sur ces violences sexuelles. Parfois, les parents ne donnent pas crédit à la parole des enfants. Certains parents ont tendance à minimiser les choses face à un grand entraîneur. Nous le relatons dans cet ouvrage. L'entraîneur a une autorité naturelle sur l'enfant. Il a peut-être plus d'autorité que les parents eux-mêmes, que les enseignants, etc. Cette autorité-là assujettit l'enfant.

C'est un point extrêmement important. Parfois, elle assujettit même l'adolescent, voire l'adulte. Il y a un phénomène d'emprise. D'ailleurs, lorsque des viols se sont produits de manière répétée, on constate une forme d'amnésie. Lorsque la personne violée retrouve la mémoire au bout d'un certain nombre d'années, ça peut avoir des conséquences extrêmement graves sur sa santé. C'est la raison pour laquelle des livres sont publiés. C'est lié à cette prise de conscience.

Sur la question des violences sexuelles, il y a aujourd'hui des outils et les choses ont avancé. L'omerta est plus compliquée. Des agents de l'État sont formés pour repérer des situations. Au sein des fédérations sportives, il y a des conseillers techniques sportifs (CTS). Les directeurs techniques nationaux (DTN) et tous les CTS derrière eux sont vigilants sur cette question.

La directrice des sports, Fabienne Bourdais, a été nommée déléguée ministérielle sur les violences sexuelles à la suite d'un rapport de l'inspecteur général qu'il serait utile que vous vous procuriez sur les violences sexuelles. C'est ce rapport qui a tout déclenché. Je ne suis pas autorisé à vous dire de quoi il s'agit, mais il me paraît important que vous ayez ce rapport. Il pose des bases et remet un certain nombre de choses en perspective.

Fabienne Bourdais a mis en place ces dispositifs-là et les a suivis pendant longtemps. Il y a donc une vraie sensibilité qui s'est développée. Est-ce que ça signifie qu'il n'y a plus de violences sexuelles ? Non, ça peut continuer. En sachant que ça se tient dans le cadre d'une relation particulière et d'une emprise qui se noue entre un entraîneur et un sportif.

Il y a une question qui n'est pas réglée aujourd'hui. Je veux ici lancer un signal d'alarme. Ce n'est pas faute de l'avoir dit publiquement, notamment à l'occasion de la parution de l'ouvrage. Je n'ai été interrogé que sur la radicalisation, phénomène d'atteinte à la laïcité. Nous avons répondu aux questions tout en évoquant également l'homophobie, qui constitue un autre phénomène.

L'homophobie, ce n'est pas simplement quelques banderoles ou des chants que l'on constate dans les stades. C'est le phénomène visible. Pour régler ce problème, il faut mettre autour de la table des organisations de supporters et avoir avec ces dernières un dialogue donnant-donnant. Or, ce n'est pas fait.

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