L'ANS intègre les associations de supporters. Elle voit les associations de lutte contre le racisme et les discriminations comme des acteurs qui les empêchent de faire évoluer le supporterisme dans le sens qu'ils souhaitent. Ils nous jugent très critiques sur ces problématiques. Je me souviens d'une première réunion que nous avions eue avec eux en présence du délégué interministériel. Nous y avions notamment dénoncé la question de l'homophobie. Il y avait une véritable différence de conception de ces problèmes. La présidente de la Ligue de football professionnelle avait d'ailleurs déclaré que les chants homophobes relevaient du folklore des stades. La conception de l'ANS n'était pas éloignée.
Tandis que nous nous étions saisis de cette question avec beaucoup de gravité. Pour l'ANS, ça relevait du domaine de la liberté d'expression. Bien que nous soyons attachés à la liberté d'expression, nous pensons qu'il y a des limites à ne pas franchir. On ne peut pas nous faire entendre que les chants homophobes ne sont pas graves et qu'ils ne font pas de victime car ils ne visent personne en particulier.
Les échanges étaient vraiment tendus parce que nous ne voyions pas du tout les choses de la même manière. Nous avons eu une réunion extrêmement houleuse au cours de laquelle le délégué interministériel s'était levé. Nous insistions pour mettre un nom sur les problèmes afin de pouvoir travailler dans le sens de leur résolution. Les relations se sont donc tendues dès la première rencontre. C'est sans doute la raison pour laquelle nous n'avons jamais été reconvoqués ; et ce, en dépit des recommandations de la Dilcrah qui avait recommandé que les associations telles que SOS Racisme et Sportitude soient intégrées à l'ANS en sachant que SOS Racisme et Sportitude ont beaucoup d'expérience en la matière et un bilan.
Je suis extrêmement sollicité car on considère que la France a un modèle qui est celui du PSG. Je pourrais revenir sur le modèle qui a été mis en place au PSG. Pour régler ces problèmes, il faut investir dans l'humain et se doter des moyens nécessaires. Il faut aussi pouvoir sanctionner. La législation actuelle nous permet de répondre sur les plans pénal et disciplinaire, mais il faut aboutir à des sanctions. On n'a pas suffisamment travaillé pour identifier les personnes qui posent problème et prononcer des sanctions individuelles, ce qui éviterait des sanctions collectives en sachant que les sanctions collectives créent souvent une fausse solidarité.
C'est la raison pour laquelle Sportitude a mis en place un dispositif qui permet d'aller vers l'individualisation des peines. Beaucoup de supporters, qui pensaient qu'on venait les gêner dans leur activité, ont eu du mal à le comprendre. L'ANS considérait que nous allions mettre fin à des pratiques qu'elle jugeait normales. Certains d'entre eux n'avaient pas conscience de la gravité des choses. Pour cela, il faut écouter et comprendre la souffrance des gens. Toujours est-il que l'ANS ne nous a pas intégrés ni convoqués à ses réunions.