Débutons par un constat : la France est le pays le plus survolé d'Europe. De cette position géographique découle une nécessité, celle de garantir un contrôle aérien efficace. C'est aujourd'hui le cas grâce à la modernisation engagée, qui permet à ce service public de combler son retard technologique. C'est surtout le cas grâce aux femmes et aux hommes qui exercent ce métier. Puisqu'il faut assurer à tout moment la continuité du survol du pays et sa sécurité, les contrôleurs aériens sont soumis à un certain nombre d'obligations. Parmi elles, celle d'un service minimum, lequel leur impose d'assurer en toutes circonstances un maintien du service.
Il faut le dire, c'est une contrainte forte qui pèse sur les agents puisqu'elle restreint leur droit de grève. C'est une contrainte d'autant plus forte que ce service minimum fait l'objet d'une application maximaliste : aujourd'hui, dans certains centres, on impose les jours de grève la présence de 80 % des effectifs normalement prévus.
De telles restrictions sont disproportionnées. Comme les syndicats, nous considérons que la première des priorités aurait dû être de travailler à une réforme du décret qui régule le service minimum, lequel date de 1985 et est, de l'avis de tous, inadapté et obsolète. Le ministre délégué chargé des transports, Clément Beaune, s'est lui-même engagé à sa révision. Pourtant, à ce jour, il n'y a ni concertation, ni dialogue social avec les syndicats sur le sujet. Nous le regrettons. Cela aurait permis de créer les conditions d'un dialogue plus apaisé sur la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui.
Concernant le texte lui-même, disons-le d'emblée : il est nécessaire. Bien que surdimensionné, le service minimum dysfonctionne. Les annulations à chaud de vols restent légion. Ces vols annulés en dernière minute sont synonymes de complications pour les compagnies et, surtout, pour les voyageurs. Il arrive aussi, à l'inverse, que la DGAC mette en place le service minimum et demande aux compagnies de réduire le nombre de vols alors que les grévistes sont finalement peu nombreux. En bref, le système en vigueur ne permet pas une réduction du trafic proportionnée au nombre de contrôleurs aériens en grève. Pourquoi ? Parce que le décret sur le service minimum n'est plus à jour, c'est vrai. Mais aussi parce qu'aujourd'hui, les grévistes n'ont pas à se déclarer individuellement. Cela rend difficile d'évaluer combien manqueront à l'appel le jour J.
La proposition de loi entend remédier à cette situation. Elle crée l'obligation pour les contrôleurs aériens de se déclarer individuellement grévistes l'avant-veille du mouvement de grève, avant midi. Bien évidemment, ils auront la possibilité de renoncer à leur participation au mouvement jusqu'à dix-huit heures le même jour. Sur la base de ces informations, l'autorité administrative pourra décider de mettre en place le service minimum. Elle disposera, pour ce faire, d'un délai contraint, là encore jusqu'à dix-huit heures l'avant-veille du mouvement. En conséquence, elle pourra déterminer avec précision le nombre de vols à annuler. Résultat : les adaptations du trafic aérien seront mieux proportionnées à l'ampleur du mouvement et les annulations à chaud pourront ainsi, nous l'espérons, être évitées.