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Intervention de André Chassaigne

Réunion du mercredi 25 octobre 2023 à 13h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

. Je constate que les conclusions du rapport apparaissent de manière clivante. Je formulerai trois remarques et interrogations.

Premièrement, nous avons un nouveau rapport sur le bilan des accords de libre-échange mais les critiques restent immuables. L'intérêt de l'ouverture des échanges internationaux, en particulier pour certains secteurs comme l'agriculture, n'est toujours pas réinterrogé par les pilotes européens des négociations commerciales. L'aveuglement libéral de la Commission, qui semble être la dernière courroie de transmission de l'OMC, porte directement atteinte à nos engagements climatiques, à nos droits sociaux, à nombre de nos intérêts industriels. Alors qu'il est impératif de repenser entièrement nos systèmes de production et d'échange, ne serait-ce que pour tenir nos objectifs contenus dans l'accord de Paris, il n'y a aucune remise en cause de la structure du commerce international, qui devrait se fonder sur les complémentarités de production et la coopération entre les États plutôt que sur la simple compétitivité-prix. Le monde a besoin d'accords et de traités de maîtrise des échanges visant la satisfaction mutuelle des besoins humains et sociaux, l'émergence de nouveaux modes de production et de développement, la préservation des écosystèmes et la souveraineté alimentaire. Pas d'accords de libre-échange. Qu'en pensez-vous ?

Deuxième remarque : l'opacité continue de régner sur le contenu de ces négociations commerciales pilotées par la direction générale du Commerce. Opacité maintes fois dénoncée, mais chaque fois renforcée ! Ainsi, dans quelques jours, la Commission devrait annoncer, en grande pompe, la conclusion d'un nouvel accord de libre-échange avec l'Australie ! Accord qui prévoirait, semble-t-il, des quotas d'importation, à droits de douane nuls ou réduits, de 20 000 tonnes supplémentaires minimum de bœuf et d'agneau australiens. Personne ne peut savoir exactement ce qu'il y a dans cet accord puisque même les députés européens ne peuvent avoir accès aux éléments de la négociation. Le secteur agricole est, comme quasiment à chaque fois, la victime permettant la conclusion du deal pour les autres secteurs. Aussi je souhaiterais connaître votre position sur l'exclusion du secteur agricole du cadre des négociations commerciales, seule mesure à même de ne pas faire de nos éleveurs et agriculteurs les victimes permanentes du dogmatisme libéral.

Troisième remarque : un volet du rapport est consacré à l'enrobage « développement durable » des nouveaux accords, dits de troisième génération. Je dis « enrobage » car les quelques lignes qui y sont consacrées ne sont pas pour nous rassurer. L'opposabilité supposée de l'accord de Paris dans les relations commerciales ouvertes par ces nouveaux accords de libre-échange, dont l'accord UE-Nouvelle-Zélande serait le pionnier, ne convainc pas grand monde. On se demande bien quels moyens pourront être mis en œuvre pour en contrôler l'efficacité alors qu'ils n'existent pas. De la même façon, les exigences les plus fondamentales pour le secteur agricole de respect des principales normes d'élevage imposées aux éleveurs européens ne sont toujours pas posées comme condition d'accès à notre marché dans les ALE, à travers des clauses miroirs ou mesures miroirs. Au final, c'est toujours plus de viande importée traitée aux antibiotiques avec toujours plus de fruits et légumes traités avec des substances interdites en Europe et l'absence de tout contrôle sur la production à l'étranger. Le Président de la République ne respecte pas son engagement sur l'introduction des clauses miroirs dans les ALE.

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