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Intervention de William Martinet

Réunion du mercredi 25 octobre 2023 à 15h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaWilliam Martinet :

Madame la rapporteure, en tant que députée, vous avez de l'influence en matière de logement au sein de la Macronie. Quand vous menez le combat avec nous pour raboter la niche fiscale « Airbnb », nous aimerions même que vous ayez encore plus d'influence au sein de cette Macronie.

Mais en lisant la partie de votre rapport qui porte sur le lien entre logement et emploi, on s'inquiète et on espère que vous aurez le moins d'influence possible. J'ai lu ce rapport attentivement et je suis en radical désaccord avec sa philosophie. On peut la résumer ainsi : au nom de la crise du logement, il faudrait que votre employeur devienne votre bailleur. Je le dis très clairement, pour nous députés de La France insoumise, c'est non ! Être salarié, c'est déjà avoir un lien de subordination et une dépendance économique. Ce que vous proposez rendra les salariés encore plus vulnérables. Perdre son emploi, ce sera perdre son salaire et son logement : rupture de contrat de travail égale rupture de bail ! Ce qui fait la gravité de vos propositions, c'est qu'elles dépassent le traditionnel logement de fonction pour nécessité de service. Votre proposition concerne des centaines de milliers de familles qui font une demande de logement social auprès d'Action Logement, le collecteur de l'ex « 1 % patronal ». Cela représente 85 000 attributions de logements sociaux par an – c'est énorme.

Au sujet d'Action Logement, je cite votre rapport : votre rapporteure considère qu'il pourrait être pertinent de « réinterroger le lien entre le logement attribué et le contrat de travail qui en a justifié l'attribution, par exemple au moyen de l'introduction dans le bail locatif d'une clause d'engagement auprès de l'employeur ». Autrement dit, la proposition que vous faites aux salariés est la suivante : non seulement vous attendrez des années pour vous voir attribuer un logement social mais en plus ce bail sera précaire : changer de boulot, c'est perdre son logement ! Il faut se rendre compte de la régression que cela représente. Imaginez les conséquences de cette mesure pour des salariés en situation de souffrance au travail qui subissent un harcèlement moral ou sexuel ou qui tout simplement ne se font pas payer leurs heures supplémentaires. Ils seront condamnés à se taire, à rester dans l'entreprise par peur de se retrouver à la rue.

Cette proposition est grave mais malheureusement il faut reconnaître qu'elle est tout à fait compatible avec le logiciel macroniste. Après tout, chez vous, tout doit être flexible et mobile, c'est-à-dire précaire et instable, pour s'adapter au marché. On comprend que le logement est un magnifique terrain de conquête. Voilà un secteur où il reste encore des droits à détruire pour que l'individu soit parfaitement soumis aux exigences du marché. Eh bien, chers collègues, nous avons pour notre part une autre vision du monde. Nous pensons que les Français ont besoin de solidité et de stabilité pour pouvoir s'épanouir, et la première des stabilités, c'est un logement digne et durable qu'on ne risque pas de perdre au bon vouloir de son employeur. Ce sera d'ailleurs le fil conducteur de nos amendements dans cette discussion budgétaire. Face à l'instabilité du marché, il faut un retour de l'État pour apporter de la stabilité. Un État qui investit pour que malgré la conjoncture économique, les logements sociaux dont nous avons besoin soient construits. Un État qui finance la rénovation thermique pour que, quelles que soient les hésitations des investisseurs, nos engagements écologiques soient tenus. Un État qui régule les prix des loyers et du foncier pour que malgré la spéculation immobilière, le logement reste un bien accessible à tous.

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