La question que vous me posez présente tout de même la particularité de s'accompagner d'une demande de scrutin public ! Car, à la fin de notre discussion sur ces amendements – si vous les maintenez –, il faudra bien que le Parlement se prononce sur un dispositif juridique.
Néanmoins, il s'agit d'un débat de fond essentiel, que nous avons eu longuement à l'occasion de l'examen de la loi de programmation militaire. Vous le savez, cette question fait l'objet d'un consensus politique, puisque sur tous les bancs, la solde de nos militaires a été considérée comme un élément clé, pas seulement en raison de l'inflation – qui est certes un facteur aggravant – ou des conséquences sur l'attractivité du métier, même si c'est un sujet d'actualité, mais aussi parce qu'il est nécessaire, tout simplement, de procéder à un rattrapage important.
D'autre part, la militarité suppose certaines spécificités : outre la solde, on pourrait mentionner le plan « famille », les logements ou même les transports – j'ai d'ailleurs réagi cet après-midi lorsqu'il a été question de l'accord sur le quart de place conclu avec la SNCF. Ces quatre amendements mettent l'accent sur la question de la rémunération, même si tous ces aspects forment un tout.
Par ailleurs, les questions liées à la rémunération sont multiples. Il faut ainsi distinguer la part indemnitaire de la part indiciaire – désormais, nous sommes aguerris en la matière. La question de la part indiciaire a été réglée par la revalorisation du point d'indice de la fonction publique en général – les militaires étant évidemment concernés –, mais surtout par les mesures spécifiques que vous avez votées dans le cadre de la loi de programmation militaire à propos de la grille indiciaire, avec le cadencement suivant, que vous avez fixé, je crois, de façon unanime : militaire du rang, puis sous-officier, puis officier, des moyens financiers étant attribués pour chacun de ces grades.
J'en viens à la part indemnitaire, point-clé dans la structuration de la rémunération des militaires. J'ai noté que vous n'aviez pas cité le mot « NPRM », la nouvelle politique de rémunération des militaires, pourtant dans l'actualité du moment. Je suis aujourd'hui, presque à la mi-novembre, en mesure de confirmer qu'une énorme partie de la NPRM a été mise en place au mois d'octobre, notamment au travers de la prime du combattant terrestre pour nos soldats de l'armée de terre. C'est d'actualité et ce dispositif fait l'objet d'un large consensus.
Peut-on faire plus et plus vite en matière de rémunération ? Nous le souhaitons tous. Mais vos amendements ponctionnent sur l'activité des forces 300 millions d'euros pour l'amendement n° 3070 , 200 millions pour les suivants. Si l'un de ces amendements est adopté, nous aurons donc 300 ou 200 millions de moins pour l'activité des forces en 2024. Or cet aspect de la vie des militaires fait aussi partie de l'attractivité : nombre de nos jeunes recrues sont aussi attentives à la nature de ce qui peut leur être proposé par la suite – je me souviens de ce que votre formation politique avait suggéré pendant le débat sur la LPM, mais on ne va pas créer inutilement une activité virtuelle. Néanmoins, la possibilité de s'entraîner et d'acquérir des compétences et des connaissances fait aussi partie de l'attractivité de l'engagement militaire.
Par conséquent, même si j'ai bien compris, vu la mobilisation de votre groupe et la demande de scrutin public, que ma demande sera vaine, je vous propose de retirer vos amendements pour laisser la première année d'exécution de la LPM se dérouler sans changement par rapport à ce qui a été voté alors sur la rémunération des militaires. Si vous les maintenez, vous ne pourrez faire fi du gage, et pas seulement parce que ce méchant article 40 de la Constitution vous en empêche, sauf à ce que je sache où prendre de telles sommes quelque part dans les crédits prévus par la programmation militaire. Il vous faudrait alors assumer la réduction de l'activité des forces, qui est contraire à ce que d'autres groupes – et même le vôtre – ont souhaité dans la loi de programmation militaire. En ce moment, nos forces ont besoin de tout sauf de sous-programmation en matière d'entraînement et d'activité. Demande de retrait, donc, pour les quatre amendements, considérant qu'ils sont contraires à l'amélioration de la LPM à laquelle nous avons tous contribué – vous-même avez été un des premiers en commission de la défense –, y compris sur le volet rémunération. Je suis certain que vous serez cohérent, monsieur Jacobelli, et que vous n'irez pas un cran plus loin pour des raisons plus politiques – vous devriez alors en admettre les conséquences en termes de diminution de l'activité des forces, et donc en termes politiques.