Intervention de Olivia Grégoire

Réunion du mardi 20 septembre 2022 à 17h00
Commission des affaires économiques

Olivia Grégoire, ministre déléguée :

Madame Petel, à partir de 2024, les entreprises de plus de 250 salariés devront publier une déclaration de performance extra-financière dans laquelle elles détailleront les implications sociales, environnementales et sociétales de leur activité, ainsi que leur mode de gouvernance. De grandes entreprises s'y préparent déjà, notamment dans le secteur de l'industrie. Elles sont 10 000 à être soumises à cette obligation aujourd'hui mais dans deux ans, pas moins de 50 000 entreprises européennes seront concernées.

Cette déclaration n'est pas obligatoire pour les PME mais elles en subissent tout de même les effets, en particulier dans le cadre des contrats de sous-traitance. J'ai récemment rendu visite, à Valence, à une PME dont l'activité principale est la sous-traitance en mécanique de précision dans le domaine aéronautique. Il s'avère que les entreprises pour qui elle travaille s'intéressent de plus en plus à son bilan carbone. Il est fort probable qu'elle serait rayée de la liste des sous-traitants si elle n'était pas en mesure de présenter son bilan environnemental ou sociétal dans les prochaines années, car sa performance environnementale dégraderait celle du donneur d'ordre.

Ces nouvelles mesures, que vous avez votées, peuvent être interprétées comme de nouvelles contraintes que nous imposons aux entreprises ou l'opportunité de devenir plus compétitives. Je penche pour la seconde possibilité, à condition de nous donner les moyens d'accompagner l'évolution de nos entreprises, notamment celles qui comptent moins de 50 salariés. Nous aurons besoin de financement, d'hommes et de femmes, et de ressources. La sobriété ne doit pas être une mode condamnée à passer une fois le cap de l'hiver franchi. Il ne s'agit pas de faire à nouveau fonctionner les climatiseurs à fond en laissant les portes ouvertes l'été prochain ! J'y travaille depuis quelques mois.

Des mesures ont d'ores et déjà été prises. Une enveloppe de 15 millions d'euros a été accordée aux chambres consulaires – chambres de commerce et d'industrie, chambres des métiers et de l'artisanat, chambres d'agriculture – pour proposer aux entreprises de moins de 10 salariés d'être accompagnées par un conseiller pour identifier des pistes d'économies d'énergie. BPIFrance propose aux PME le Diag Éco-flux, qui consiste en un accompagnement personnalisé pour réaliser rapidement des économies durables en réduisant les consommations d'énergie, de matières, d'eau, et la production de déchets. Ce dispositif, qui coûte environ 4 000 euros pour un site de plus de 200 salariés et 6 000 euros pour un site de 50 à 250 salariés est financé pour moitié par BPIFrance. Elle propose également un prêt vert aux PME et ETI qui souhaitent financer un projet de transition écologique et énergétique destiné à améliorer leur performance énergétique, réduire l'impact environnemental ou développer la mobilité zéro carbone. Ce prêt vert donne de bons résultats et pourrait être amélioré. Comme souvent pour les prêts accordés par la BPI, l'effet de levier est important. Il peut permettre à des entreprises de 30 ou 40 salariés de recevoir rapidement les fonds nécessaires pour renforcer leur politique de tri des déchets, installer des panneaux photovoltaïques ou renouveler la flotte de véhicules. En revanche, il est nécessaire d'avoir fait réaliser un diagnostic environnemental pour bénéficier du prêt vert. Il est logique de corréler prêt vert et diagnostic environnemental, d'autant plus que ce dernier peut être en partie financé par la puissance publique.

Dans le cadre du plan de relance, le dispositif VTE vert finance jusqu'à 12 000 euros l'embauche par une PME-TPE d'un jeune diplômé pour une mission en lien avec la transition écologique de l'entreprise – verdir la chaîne logistique, développer une politique d'achat durable, faire évoluer les process industriels. Le plan de relance avait permis d'en financer 1 000 et il en reste quelques centaines à pourvoir. C'est une autre manière d'accompagner la transition des PME.

Les efforts des entreprises pour devenir plus sobres doivent être le prélude à des actions plus durables. Beaucoup reste à faire pour mener la transition environnementale. Il ne suffit pas de prévoir des mécanismes d'aides, encore faut-il les faire connaître et les rendre accessibles aux entreprises. Les chambres consulaires réalisent un travail remarquable en l'espèce. Les PME ne doivent pas hésiter à les contacter.

Madame Duby-Muller, j'espère que vous serez des nôtres jeudi. Dans le cadre de la renégociation des contrats d'énergie, en particulier la renégociation tacite, sachez que le médiateur national de l'énergie peut être saisi par n'importe quelle entreprise d'un territoire de montagne qui se sentirait floué. Avec Roland Lescure, j'ai bien rappelé au médiateur qu'il était important d'accompagner les entreprises confrontées à cette situation.

Vous dites qu'il serait délicat d'augmenter le prix des forfaits. D'autres stations feront ce choix, notamment parce qu'elles sont de petite taille et qu'une légère hausse des tarifs ne découragera pas les touristes. Les situations diffèrent d'une station à l'autre, ce qui explique que nous ayons à cœur d'accompagner les élus. Quant à la réduction de 10 % demandée par la CRE, c'est le minimum que l'on puisse exiger en matière de sobriété. Je ne doute pas que les acteurs concernés y parviennent. En revanche, il est possible qu'en cas de tension supplémentaire, nous devions demander de réduire de 20 % ou 25 % la consommation d'énergie. C'est cela qui est plus inquiétant. Nous sommes conscients des difficultés qui se profilent à l'horizon et nous échangerons avec les professionnels et les élus lors du prochain congrès pour trouver des solutions – ils sont d'ailleurs très régulièrement reçus à Bercy depuis l'été. Le scénario d'une réduction de 10 % de la consommation d'énergie est quasiment écrit mais il est plus difficile de dessiner les contours de celui d'une réduction de 25 %.

Monsieur Potier, nous transmettrons votre message concernant le brandjacking à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

S'agissant de l'intéressement et de la participation, vous connaissez mon engagement dans ce domaine. Il faut de la ténacité pour parvenir à ses fins. Je connais les positions de la CFDT, de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et de l'Union des entreprises de proximité (U2P). J'ai à cœur d'aller plus loin, même si nous avons déjà fait beaucoup en adoptant la loi PACTE.

L'intéressement, qui atteint 8 milliards d'euros, a profité à près de 5 millions de salariés pour un montant moyen de 1 850 euros par bénéficiaire. La loi PACTE a porté ses fruits. À titre personnel, j'approuve votre demande d'élargir la participation mais je me dois, en tant que ministre, d'approfondir le sujet avec mes homologues de Bercy et la Première ministre. En tout cas, je serai toujours à vos côtés pour favoriser l'augmentation de la rémunération des salariés dès lors qu'elle ne met pas en péril la pérennité de l'entreprise.

Madame Goulet, les boulangers subissent en effet la hausse des prix des intrants dans la fabrication du pain. Plus de 70 % des TPME réagissent en répercutant cette hausse sur leurs prix de vente. Si le beurre augmente, le croissant au beurre aussi. Cette situation n'est pas appelée à perdurer. Les boulangers de nos bourgs et villages sont souvent des indépendants. Très souvent, ils font des tournées pour livrer. Rappelons que, jusqu'à la fin de l'année, les véhicules utilitaires sont concernés par la remise à la pompe. Je me demande si ces boulangers ne pourraient pas également bénéficier des TRV, les tarifs réglementés de vente du gaz et de l'électricité, qui profitent à 1,5 million de TPE. J'évoquerai ce sujet avec Bruno Le Maire.

Monsieur Cordier, ainsi va l'économie keynésienne : quand tout va bien, l'impôt sur les sociétés augmente – 1,7 milliard de recettes supplémentaires cette année ; quand cela va un peu moins bien, les recettes fiscales diminuent. Cela étant, ne nous inquiétons pas outre mesure. Les recettes furent suffisamment exceptionnelles cette année pour supporter un recul l'année prochaine. Le taux de l'IS est passé de 33 % à 25 % au cours du précédent quinquennat. Avec Bruno Le Maire, j'espère que la proposition d'instaurer un impôt minimum mondial des sociétés de 15 % aboutira.

M. Girardin m'interroge sur les conséquences des ZFE-m sur l'activité des artisans. La disposition, votée, doit être mise en place – nous n'avons que peu de temps pour faire bouger les lignes sur les sujets environnementaux.

Tous les véhicules ne polluent pas de la même façon, et nous devons être particulièrement attentifs à leur circulation au sein des ZFE-m. S'il convient peut-être d'accompagner un peu plus le passage à l'électrique pour les utilitaires, je rappelle que le Gouvernement a mis en place des aides substantielles. Elles peuvent atteindre 14 000 euros pour l'achat d'un véhicule utilitaire électrique, quand on inclut la prime à la conversion, et 150 000 euros pour l'achat d'un poids lourd électrique.

Je comprends que les ZFE-m soulèvent certaines interrogations, légitimes, des indépendants et des artisans mais, je le répète, il est très important de les mettre en place. Cela doit se faire de manière concertée avec les parties prenantes, ce qui n'est pas forcément le cas dans toutes les collectivités locales. C'est pourquoi j'ai demandé à mes services d'organiser une réunion d'information avec les organisations professionnelles sur les enjeux, les dispositifs d'accompagnement de l'État, ainsi que l'offre de véhicules. Bien informés, les artisans et indépendants seront en mesure d'anticiper et d'activer les primes.

Madame Marsaud, les assises du commerce, que je n'ai pas impulsées mais que j'ai suivies avec beaucoup d'attention, ont rassemblé pendant plusieurs semaines les commerçants, les élus locaux, les organisations professionnelles, des universitaires, etc. Cet exercice, inédit pour le secteur, a déjà permis de poser un diagnostic sur ses mutations magistrales : l'évolution des modes de consommation, les changements dans la répartition de la valeur, l'installation de grandes et moyennes surfaces durables, etc. Ces assises ont également mis en lumière des pistes pour l'avenir. Je pense en particulier à la structuration du secteur ou aux enjeux autour du commerce dans les territoires, au-delà des cœurs de ville.

Du fait de la conjoncture, les assises du commerce n'ont pas fait l'objet d'une conclusion lors du précédent quinquennat, mais soyez assurée que je prendrai mes responsabilités dans les toutes prochaines semaines. Nous tiendrons compte des recommandations, notamment en ce qui concerne les enjeux de gouvernance de cet écosystème, très divers. C'est indispensable.

Enfin, Monsieur Bothorel, il existe plus de 10 000 stations de lavage en France – centres de lavage spécialisés ou stations-service équipées de portiques conventionnels. Certaines ont dû interrompre leur activité sur décision administrative, à cause de la sécheresse. Le Gouvernement s'est saisi des demandes d'accompagnement. Nous recensons de façon exhaustive les situations, qui ne sont pas identiques sur les territoires, en fonction des durées et des conditions de fermeture édictées. Mes services travaillent avec les organisations représentatives du secteur pour recueillir leurs éléments.

Les stations de lavage ont pu, et peuvent encore, recourir à l'activité partielle lors de ces périodes de fermeture. Nous examinons de près la situation des 190 stations de lavage costarmoricaines, afin de trouver des voies autres que le chômage partiel pour l'avenir.

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