La fanfare de la majorité a beau claironner que le budget pour l'agriculture est bon, historique et qu'il est en augmentation, le budget 2024 ne nous semble pas à la hauteur, même avec à sa tête un soliste comme vous, monsieur le ministre. Il est loin de protéger nos agriculteurs et d'accompagner la transition générationnelle au moment où les crises s'additionnent : sécheresse, événements climatiques, explosion du prix des matières premières, crise de l'eau, concurrence déloyale, effondrement de la démographie agricole, baisse de la consommation alimentaire… Pour résumer, les signaux sont au rouge et la politique agricole est très en deçà des enjeux.
Enfermée dans des équilibres qui ne tiennent plus, la nouvelle version de la PAC est critiquée de toutes parts. Sa déclinaison nationale ne voit pas plus loin que le bureau de la Commission européenne. Selon un grand nombre d'acteurs, les mesures prises pour remplir les objectifs climatiques et l'absence de perspective d'ensemble pour l'avenir de l'élevage témoignent d'un faible niveau d'ambition.
Les choix faits à Bruxelles et validés à Paris mettent à mal des milliers d'exploitations. En étendant le bénéfice des écorégimes à près de 90 % des exploitations, nous diluons le soutien autrefois apporté à ceux qui investissaient fortement pour faire évoluer leurs pratiques et nous perdons un effet de levier pour encourager vraiment la transition agricole.
L'agriculture biologique est la première sacrifiée : avec le nouveau régime, l'aide de la PAC passera de 110 euros à 92 euros par hectare. Alors que le bio est en grande souffrance et subit de premières déconversions, ce coup de rabot dangereux pourrait conduire notre pays à ne jamais atteindre ses objectifs.
La politique française corrige mal le tir de la PAC, même si elle déverrouille des projets intéressants comme le pacte en faveur de la haie et le plan Protéines végétales. Quel soutien pour l'élevage ? Quel soutien pour la filière laitière, dont les difficultés s'amoncellent ? Près de 1 000 vaches laitières ont été perdues en quelques mois à l'échelle de ma circonscription, et il ne s'agit que d'une mesure au doigt mouillé.
Partout, des éleveurs se séparent de leur troupeau, convertissent les prairies en grande culture, renoncent aux haies. Ils passent trop de temps et dépensent trop d'énergie pour des revenus qui ne sont pas décents ; ils souffrent de l'absence de relève de génération et de coûts énergétiques prohibitifs. La production de lait recule et si nous n'inversons pas la courbe, la France, pourtant pays de cocagne, pourrait devenir importatrice en 2027.
Il nous faut un plan Marshall pour arrêter cette hémorragie et réarmer la filière laitière – et plus largement la filière bovine.