Dans votre propos liminaire, vous nous avez expliqué que vous n'auriez pas postulé si vous n'aviez pas eu la conviction qu'un modèle était viable pour l'Office national des forêts. Plus je vous écoute, et plus je me dis qu'au vu de la situation, vous n'auriez peut-être pas dû postuler.
Depuis des années, le maître mot, c'est coupe rase : coupe rase budgétaire, coupe rase des moyens, mais aussi multifonctionnalité qui est – passez-moi l'expression – l'arbre qui cache l'état de la forêt car elle laisse entendre que tous les équilibres sont possibles. L'été que nous avons passé illustre que les équilibres actuels et la logique économique sont mis à mal. Vous pariez sur l'équilibre grâce à la production de bois, mais c'est un pari incertain, voire fou, quand on analyse l'état général de la ressource : 70 000 hectares sont partis en fumée – dix fois plus que les années précédentes ; la forêt est malade du fait de la sécheresse, des scolytes ou d'autres situations dramatiques.
Comment alors imaginer retrouver un équilibre ? Comment en faire le pari sans une implication forte de la puissance publique, de l'État, afin de ne pas dépendre de la production de bois ? Quelle est la réalité : 87 % des replantations d'arbres promises par Emmanuel Macron ont été utilisées pour des coupes rases en monoculture, qui destructurent la forêt, mais aussi le travail des agents.
Comment développer les liens avec les collectivités ou les organisations non gouvernementales (ONG) sans garantie d'une stabilisation, voire d'une augmentation des effectifs ? Vous ne nous avez d'ailleurs pas répondu sur les 500 suppressions de postes encore programmées. Les préfets vous alertent sur l'importance des ouvriers forestiers pour lutter contre l'incendie. Vous parlez numérisation, digital, mais cela ne réglera pas vos problèmes.
Une autre ambition est nécessaire : plus d'effectifs, plus de moyens afin de protéger la ressource et pouvoir, un jour, créer de véritables filières d'exploitation du bois. La multifonctionnalité sera alors une réalité, et non pas une illusion entretenue. Comment construire un modèle économique durable de la forêt ? Alors que nous avons reçu des alertes quant à votre nomination, comment comptez-vous rétablir la confiance au sein de l'ONF après deux directions catastrophiques, qui ont créé un état de défiance absolue ?