Intervention de Mathilde Panot

Réunion du mercredi 14 septembre 2022 à 9h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

Quelle étrange sérénité se dégage de vos propos, alors que notre pays vient de connaître des épisodes successifs d'incendies de forêt, entraînant l'évacuation de près de 40 000 personnes et la disparition d'environ 20 000 hectares de forêts cet été en Gironde. Quelle sérénité, alors que l'Office national des forêts a perdu 40 % de ses effectifs en vingt ans – vous n'avez pas évoqué ce chiffre. Avec quels moyens le Président de la République compte-t-il enclencher son fameux plan de replantation, en lien avec l'ONF ? Quelles sont les conséquences de la perte de presque la moitié des effectifs de l'Office national des forêts ? Vous n'avez pas dit un mot de la souffrance des agents : depuis 2000, il y a proportionnellement plus de suicides d'agents à l'ONF qu'il n'y en a eu à France Télécom.

Désormais, un agent est en moyenne en charge de 1 700 hectares, contre 800 il y a vingt ans, réduisant nos chances d'intervenir rapidement en cas d'incendie. Pourtant, vous le savez, ces derniers vont se multiplier et les agents sont en première ligne pour alerter sur les départs de feu, et les combattre.

Le COP 2021-2025 ne prévoit aucune augmentation des moyens de la mission de défense des forêts contre l'incendie, au grand dam de certains préfets, qui n'ont pas manqué d'épingler le Gouvernement pour cet oubli. Madame, faire mieux avec moins, cela n'existe pas !

Vous semblez bien sereine alors que l'ONF recrute désormais des salariés de droit privé, en lieu et place de fonctionnaires, pour effectuer ses missions de police judiciaire, sans même disposer de moyens pour les former.

Vous semblez bien sereine alors qu'à l'heure du dérèglement climatique, nous avons besoin de moyens humains pour observer les écosystèmes forestiers, la résilience de certaines espèces et leur réaction face aux aléas. L'incertitude écologique exige de renforcer l'expertise et la recherche et développement du service public forestier. Les agents dénoncent la perte de sens de leur travail : ils sont contraints de prélever toujours plus de bois – vous semblez vouloir poursuivre dans la même direction – au détriment des missions d'intérêt général liées à la préservation de la biodiversité ou à l'accueil du public.

Comment être sereine alors que vous laissez entendre que l'Office national des forêts pourrait poursuivre ses missions à effectif constant ? Vos agents ne le sont plus car ils ont vu défiler cinquante nuances de technocratie et d'austérité à la tête de l'Office. Si vous êtes le énième visage de la confusion entre entreprise privée et intérêt général, alors vous êtes la candidate idéale pour Emmanuel Macron.

Notre groupe s'opposera à votre nomination car – je cite un agent – « un forestier n'est qu'un héritier et, nous, on hérite du travail des autres. Maintenant que va-t-on donner ? ».

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