Cette mission occupe une place à part dans le budget général de l'État. C'est la mission la plus importante par son volume et, en même temps, ses crédits ne correspondent pas à proprement parler à des dépenses mais à de moindres recettes. C'est pourquoi ils ne sont qu'évaluatifs et non pas limitatifs.
La mission retrace donc l'ensemble des restitutions que l'administration fiscale est conduite à verser aux contribuables, qu'il s'agisse du fonctionnement normal de l'imposition en question, de l'application d'un avantage fiscal comme le crédit d'impôt ou, encore, d'une correction du montant dû par le contribuable, ce qui arrive notamment à la suite de contentieux.
Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit que les remboursements et dégrèvements s'élèveront à un peu plus de 140 milliards d'euros, ce qui représente l'équivalent de près de 29 % des recettes fiscales brutes. Ce montant augmente de 8,6 milliards d'euros par rapport à l'évaluation faite en loi de finances pour 2023, soit une hausse de 6,5 %.
Cette progression importante est essentiellement due à l'accélération du rythme de remboursement des crédits de TVA, qui devraient s'élever à 10,6 milliards d'euros en 2024. Cette dynamique est néanmoins atténuée par une baisse anticipée des restitutions de trop-versés d'impôt sur les sociétés (IS), de l'ordre de 2,8 milliards d'euros.
Les évolutions que je viens d'évoquer concernent le programme 200, Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, qui concentre 97 % des crédits de la mission. Les 3 % restants sont regroupés dans le programme 201, Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux. Ils devraient s'élever à 4,3 milliards d'euros en 2024 et accusent une baisse de 6,5 % par rapport à la dernière loi de finances.
Cette diminution est la conséquence de la réforme de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui, mécaniquement, entraînera une réduction des restitutions. Cette baisse devrait être de l'ordre de 380 millions d'euros.
Deux crédits d'impôt au sujet desquels nos débats ont été animés lors de l'examen de la première partie de ce projet de loi de finances doivent appeler notre attention.
Le crédit d'impôt recherche (CIR) est le plus coûteux parmi ces dispositifs : presque 7,7 milliards d'euros anticipés pour 2024 et aucune réforme à l'horizon. Année après année, il fait pourtant l'objet de rapports critiques de la part de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), de France Stratégie, de la Cour des comptes, du Conseil des prélèvements obligatoires, sans compter les rapports parlementaires.
Notre commission avait envoyé un signal fort en adoptant l'amendement du groupe LIOT auquel nous nous étions ralliés afin d'au moins réduire le taux du crédit d'impôt passé un certain seuil de dépenses de recherche et développement. Hélas, le Gouvernement n'a pas souhaité le retenir dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité. M. Le Maire n'a aucun complexe à laisser filer les milliards en la matière, à créer une nouvelle niche fiscale pour la Fifa – Fédération internationale de football association – et les salariés des fédérations sportives internationales, mais quand il s'agit de transformer une réduction d'impôt pour les résidents en Ehpad en un crédit d'impôt, il n'y a plus personne. Alors que nous atteignons un montant record, il serait opportun de lancer une réflexion sur les modalités d'une réforme du CIR pour le rendre plus efficient et, au moins, stabiliser son coût.
L'autre crédit d'impôt coûteux, dont la dynamique est constante, est le crédit d'impôt services à la personne (Cisap), avec ses 6,2 milliards d'euros. Contrairement au crédit d'impôt recherche, il n'a pas fait l'objet d'évaluations approfondies. C'est la raison pour laquelle, l'an dernier, nous avions adopté un amendement, dont j'étais l'auteur, pour connaître la répartition de cette dépense fiscale par activité éligible, amendement qui a été repris dans le texte promulgué.
Je vous livre le résultat de cette analyse : plus de la moitié du Cisap, soit 3 milliards, correspond à l'entretien de la maison. Le jardinage représente quant à lui 15 %. Au final, les activités liées à l'assistance aux personnes dépendantes, n'en représentent que 25 % en cumulant tous les services à la personne qui peuvent en relever. Il est temps que nous ayons un vrai débat sur la réforme de cette dépense fiscale.
Enfin, d'autres sujets me préoccupent comme les règlements d'ensemble ou les erreurs d'attribution de taxes foncières, mais ils feront l'objet d'amendements de ma part.
Malgré ces réserves, je vous invite à voter les crédits de cette mission, c'est-à-dire d'en prendre acte. Je vous rappelle, en effet, qu'ils sont évaluatifs et ne sont que la conséquence des mesures fiscales en vigueur.