La hausse du recours aux arrêts maladie est liée à la dégradation des conditions de travail et notamment aux risques psychosociaux pesant de manière croissante sur les salariés. Après avoir favorisé et encouragé la pratique de la téléconsultation, à laquelle nous nous étions opposés, le Gouvernement fait maintenant planer une suspicion de fraude au-dessus des patients, qui peinent à trouver un médecin disponible, ainsi que des médecins, accusés de complaisance – sauf lorsqu'il s'agit de policiers.
La limitation des arrêts maladie non seulement cède à la pensée de court terme, mais surtout fait fausse route. Elle inciterait en effet nos concitoyens à renoncer à leur droit à une prise en charge convenable, dans des délais raisonnables, et les conduirait à travailler malgré leur état de santé. Elle pousserait au présentéisme les salariés malades, favorisant la transmission des maladies et l'aggravation des pathologies. En définitive, cette mesure est mauvaise pour la santé individuelle, mais aussi la santé publique et les finances de la sécurité sociale.
En se focalisant sur la prescription d'arrêts de travail en téléconsultation, cet article ignore la situation de pénurie générale d'offre de soins. Il ne tient pas compte du fait que 11 % de nos compatriotes n'ont pas de médecin traitant – soit plus de 6 millions de Français –, que le nombre de médecins généralistes recule de 1 % par an depuis 2017 et qu'il n'y a pas de perspective d'amélioration de la densité médicale d'ici à 2033 – cette dernière est d'ailleurs en baisse dans 75 % des départements. Dans ce contexte, il est inenvisageable que chaque salarié puisse avoir accès à un rendez-vous physique avec un médecin dans un délai de trois jours – et même de deux jours pour le renouvellement d'un arrêt maladie, lequel doit être prescrit la veille.