Malgré la « nouvelle donne ferroviaire » annoncée en fanfare, le Gouvernement et la majorité n'ont toujours pas compris l'urgence d'investir dans les trains du quotidien et continuent de gaspiller l'argent public dans de grands projets inutiles ou dans le développement d'infrastructures routières destructrices pour l'environnement.
Le train pollue soixante-cinq fois moins que l'avion, vingt-six fois moins que la voiture thermique et douze fois moins que la voiture électrique : il s'agit d'une alternative évidente dans laquelle nous devons investir. La France a pourtant accumulé les retards et dispose d'un réseau ferroviaire trois fois moins développé que celui de l'Allemagne. Après plusieurs décennies de sous-investissement, notre réseau est vieillissant – vingt-neuf ans contre dix-sept en moyenne en Europe – et l'un des moins empruntés avec des péages pourtant deux fois plus élevés que la moyenne européenne. En l'état actuel des investissements, il nous sera impossible d'atteindre les objectifs fixés dans la LOM.
La régénération du réseau nécessite entre 1 et 2 milliards d'euros supplémentaires par an, selon l'aveu même du ministre délégué M. Clément Beaune. Nous en sommes loin, et le rapport de Mme Brulebois souligne à raison que les modalités de financement des investissements supplémentaires annoncés en faveur de la régénération et de la modernisation du réseau ferroviaire d'ici à la fin du quinquennat restent à déterminer et à programmer. Les membres du groupe Écologiste-NUPES appellent donc à accélérer ce chantier, afin d'augmenter fortement l'offre.
À cette priorité s'ajoute le besoin d'investir dans les petites lignes, le fret et les trains de nuit. La plupart des trains de nuit français ont été démantelés entre 2016 et 2017 : nous proposons d'investir 1,5 milliard d'euros pour construire un parc de matériels qui permettra, d'ici à 2030, le développement ambitieux d'un réseau de trains de nuit à travers la France et l'Europe.
Où est l'argent qui manque aux trains du quotidien ? Comme nous le dénonçons depuis des années, vous privilégiez les grands projets inutiles et routiers. Ce PLF offre deux exemples de cette politique. Le premier est le Charles-de-Gaulle (CDG) Express, qui bénéficie de 367 millions d'euros, soit quatre fois plus que le fonds destiné à accompagner la mobilité durable dans le plan France ruralités : les priorités du Gouvernement apparaissent clairement. Le projet CDG Express est celui d'une ligne inutile entre l'aéroport de Roissy et la gare de l'Est, destinée à des touristes fortunés : ce projet a reçu un avis accablant de l'Autorité environnementale. Toute ressemblance avec un autre projet actuellement contesté n'est pas fortuite : les mêmes causes produisent les mêmes effets, et vous reproduisez sans cesse les mêmes erreurs.
Le deuxième exemple est le maintien de l'investissement massif dans le routier, alors que les scientifiques nous alertent chaque jour sur la nécessité d'encourager le report modal. Le budget du Gouvernement prévoit d'augmenter les fonds de concours du développement routier de 114 millions d'euros, portant la dépense totale à près de 1 milliard d'euros pour le PLF pour 2024.
Il y a donc beaucoup d'argent disponible, mais celui-ci n'est pas investi là où il devrait l'être.
Enfin, le rapport de Mme Masson sur le transport aérien est désolant, tant ses recommandations se situent à l'opposé des conclusions scientifiques. On peut lire dans votre rapport que la transition énergétique de l'aérien doit passer par l'investissement massif dans les technologies de décarbonation plutôt que par la pénalisation du secteur et de ses usagers, ou encore que l'utilisation de carburants d'aviation durables constitue le levier le plus prometteur pour la décarbonation. J'espère qu'une majorité d'entre nous en a conscience, mais je préfère le répéter pour m'en assurer : la priorité des priorités pour décarboner le secteur aérien réside dans la réduction du trafic.
Pour conclure, je rappellerai les priorités des écologistes, qui sont également celles des scientifiques et des citoyens et qui devraient donc être les vôtres : mettre un coup d'arrêt aux nouveaux projets routiers et faire contribuer les géants autoroutiers à la transition écologique ; pénaliser l'avion par rapport au train et taxer le kérosène car les plus pauvres n'ont pas à payer pour les loisirs des plus riches ; sortir, au profit de tous, des grands projets inutiles comme le CGD Express, l'A69, le grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) ou la ligne entre Lyon et Turin, qui détournent l'argent public de la régénération et de la modernisation du réseau classique ; investir davantage dans le fret ferroviaire et fluvial ; rehausser l'ambition sur les petites lignes et les trains de nuit ; enfin, investir massivement dans la multimodalité et dans les infrastructures cyclables.