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Intervention de Christophe Béchu

Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 18h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires :

Le champ ministériel que j'ai l'honneur de représenter, qui va de la cohésion des territoires à la transition écologique, passant par des ministres délégués dont vous auditionnerez certains, je serai elliptique sur les questions de transport et de logement afin d'éviter des redites. Je me concentrerai sur la vision globale et les rapports entre transition écologique et cohésion des territoires, puisqu'un des sujets est la territorialisation de la planification écologique, sa déclinaison et son opérationnalisation. Cette jointure entre les collectivités et l'État, pour atteindre la somme de financements nécessaires pointés dans le rapport de M. Pisani-Ferry, dans le chiffrage de l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE) et d'autres, repose sur une mobilisation complémentaire des collectivités territoriales, donc sur un effet levier de l'État.

Si l'année 2023 a été marquée par la création du fonds vert, doté de 2 milliards d'euros, l'année 2024 est beaucoup plus ambitieuse en termes de montant comme d'objets bénéficiant d'accélérations budgétaires.

Un montant de 10 milliards d'euros est consacré aux autorisations d'engagement (AE) complémentaires au titre de la planification écologique car, en la matière, ce qui compte c'est le niveau des autorisations d'engagement puisque, par définition, en particulier dans le domaine ferroviaire, le sujet n'est pas seulement ce qu'on décaisse dans l'année, puisqu'on a l'obligation d'attendre les services faits pour décaisser les crédits, mais bien ce qu'on autorise et ce qu'on lance pour le rendre possible. Ce chiffre de 10 milliards d'euros comprend 7 milliards de crédits de paiement (CP). Dans les 10 milliards d'AE, 7 milliards concernent le pôle ministériel dont j'ai la responsabilité et 3 relèvent d'autres ministères : 1 milliard d'euros pour le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, principalement pour la forêt, dont il a la tutelle même si nous travaillons ensemble sur beaucoup de sujets, 1,5 milliard d'euros pour l'industrie verte et 500 millions d'euros pour la rénovation thermique des bâtiments de l'État, contre 100 millions cette année, ce qui traduit une première étape du chantier global de la rénovation, qui ne porte donc pas uniquement sur les logements privés.

Au total, dans ce pôle ministériel de la transition écologique, les crédits progressent de 15 % et 62 milliards d'euros sont inscrits en crédits de paiement.

La grande nouveauté concerne les effectifs. Depuis vingt ans, quels que soient ceux qui en assumaient la responsabilité, ce pôle ministériel rendait des centaines de postes tous les ans. Ainsi, près de 20 000 postes ont été rendus, certains au titre de politiques de décentralisation, de la révision générale des politiques publiques (RGPP), de réductions, de non-remplacements de départs, etc. L'année dernière, pour la première fois depuis vingt ans, la situation a été globalement stable, avec quelques hausses pour Météo-France, à l'Office français de la biodiversité (OFB), à l'Office national des forêts (ONF) notamment, et quelques baisses. Pour l'année à venir, 760 postes vont être créés à l'échelle de ce pôle ministériel, répartis entre les opérateurs, Agence de la transition écologique (Ademe) et agences de l'eau. Compte tenu des enjeux, on ne peut pas augmenter les moyens de ces agences au regard des sécheresses et ne pas renforcer les effectifs qui sont en première ligne pour lutter contre les fuites et appliquer les dispositifs présentés à Savines-le-Lac dans le cadre du plan Eau. Des postes sont également créés au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (CELRL), à Météo-France et à l'Office français de la biodiversité (OFB).

Vingt-cinq postes sont aussi créés à la direction générale de l'aviation civile (DGAC) pour les contrôleurs aériens dans le cadre de la planification de trajectoires pour l'optimisation du trafic. Ils dépendent d'un budget annexe mais sont néanmoins dans le périmètre du ministère. Les autres postes sont créés pour les services du ministère, dont une centaine spécifiquement dédiés à l'accompagnement de la ruralité et des élus locaux pour les politiques territoriales de transition écologique. Enfin, un effort particulier est fait pour la surveillance des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) où près de cent postes sont créés.

La planification écologique qui a été présentée il y a quelques semaines montre comment nous allons tenir nos engagements climatiques en 2030 grâce à cinquante-deux leviers d'action. Tous ne nécessitent pas un engagement budgétaire et tous ne reposent pas uniquement sur des engagements de l'État. Certains relèvent d'entreprises, d'efforts de particuliers, de réallocation de crédits, etc. Néanmoins, le rapport Pisani-Ferry chiffre le besoin global à 68 milliards d'euros, dont une trentaine relèvent de la sphère publique – je parle bien des crédits nouveaux et non d'éventuelles réorientations. Dans la sphère publique, la part de l'État se situe entre 15 et 20 milliards d'euros, que viennent compléter les efforts des collectivités territoriales. J'observe au passage que le fonds vert, doté de 2 milliards d'euros, a généré 10 milliards d'investissement des collectivités territoriales, sur la base des 17 000 dossiers déposés.

Le fonds vert passe de 2 à 2,5 milliards d'euros, ce qui permet d'augmenter de 40 % la part dédiée à l'accompagnement des projets dans les territoires. L'effort portera principalement sur la rénovation des bâtiments des collectivités territoriales, en particulier grâce à un plan spécifique pour les écoles qui fait l'objet d'un bouquet de financement avec le nouveau dispositif EduRénov' présenté, il y a quelques semaines, à l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF).

Le deuxième grand volet concerne la rénovation énergétique globale pour laquelle sont prévus 1,6 milliard d'euros de nouveaux crédits. Demain, devant le congrès de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), le ministre délégué à la ville et au logement détaillera une partie des éléments nouveaux en termes de barème. Je me tiens à votre disposition pour entrer dans le détail. Retenez l'objectif de passer, grâce au déploiement du dispositif Mon accompagnateur Rénov', à une moyenne de 200 000 rénovations performantes – sur un total de 700 000 –, contre 65 000 lors des deux premières années.

1,6 milliard d'euros d'AE de plus seront consacrés au soutien des mobilités. Si ces crédits sont très largement fléchés vers le ferroviaire, on doit aussi relever les mesures en faveur de la voiture électrique, telles les évolutions du bonus-malus, et la mise en œuvre, courant novembre, du dispositif de leasing qui, pour la première fois, concernera uniquement des voitures construites en Europe. Afin de valoriser les énergies décarbonées nécessaires à leur production, on tiendra compte de l'empreinte globale de leur cycle de vie, en fonction non seulement de leur motorisation mais aussi de l'endroit où elles sont produites.

Bien sûr, le plan Vélo est reconduit, tandis que les crédits destinés au verdissement de l'automobile atteindront 1,5 milliard d'euros. Conformément à l'engagement pris à Savines-le-Lac, le 30 mars dernier, un complément d'un demi-milliard d'euros est prévu pour les agences de l'eau.

La stratégie nationale pour la biodiversité (SNB), qui ne doit pas être l'angle mort de notre transition écologique, bénéficie de 400 millions d'euros de plus, soit un doublement des crédits affectés à la biodiversité. Une partie est destinée au monde rural, ce qui constitue une petite révolution, parce qu'elle accompagne l'objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) et de préservation de nos espaces. Une partie – 60 millions d'euros contre zéro – des dotations aux collectivités reposera non seulement sur le nombre d'habitants, mais aussi sur la préservation des aménités rurales.

Nous reconduisons à des hauteurs historiques les crédits destinés à l'économie circulaire. Compte tenu de son succès, le fonds chaleur de l'Ademe est doté de 300 millions d'euros de plus.

Enfin, s'agissant des « COP régionales », la planification suppose de changer d'optique et de logique. Dès lors que l'on explique où l'on va aller, quelles sont les réductions escomptées et comment on compte y parvenir, il est nécessaire de planifier et d'accompagner en amont par de la réglementation, du budget, de la fiscalité, des évolutions ou des innovations techniques. Si l'État a un rôle, celui des collectivités est considérable. Même s'il n'est pas prédominant, un gisement se trouve dans la gestion des déchets au niveau local, où doivent aussi être débattues la préservation de la biodiversité ou l'évolution de la ressource en eau. Concernant les mobilités, ce ne sont pas seulement le budget dédié au plan Vélo national et l'aide à l'acquisition qui permettent de gagner des parts de marché, mais aussi l'existence de pistes cyclables sécurisées qui donnent envie de prendre son vélo. De même, c'est la complémentarité entre les régions et l'État qui détermine les politiques ferroviaires ; c'est l'existence de bornes communales de recharge qui accompagnent la politique de verdissement et la politique industrielle. Il convient donc d'additionner et d'harmoniser les différents échelons, en confiant aux régions le déploiement de ces gisements de baisse, avant de descendre vers le bloc communal et de faire, à ce niveau, des contrats de relance et de transition écologique (CRTE) des contrats de réussite de la transition écologique, en mettant les financements en face des projets.

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