Il y a un an, nous adoptions un Ondam qui, en valeur réelle, c'est-à-dire déduction faite de l'inflation, était négatif : - 0,6 %, soit un recul considérable. Nous nous inquiétions du risque que des rallonges budgétaires se révèlent indispensables ; on nous expliquait qu'il s'agissait de l'Ondam le plus généreux depuis René Coty – c'est du reste théoriquement le cas de toutes les réformes accomplies par ce gouvernement. La réalité est autre.
Quand on regarde certains indicateurs, en particulier le nombre d'actes réalisés à l'hôpital et le nombre de soignants supplémentaires, on prend bien conscience que la charge de travail par soignant ne cesse d'augmenter, ce qui met nos hôpitaux en difficulté.
D'autre part, nous avons remarqué que durant la période qui a précédé cette situation particulière que fut la crise de la covid-19, le nombre d'actes réalisés dans les cliniques privées, après dix-huit mois de grève dans les services hospitaliers, était pour la première fois supérieur à celui des actes réalisés à l'hôpital public. Autrement dit, nous avons pour la première fois assisté à un rationnement de l'offre de soins d'un hôpital public exsangue. C'est à ce moment-là que l'on posait devant toute personne se présentant à l'hôpital la fameuse question : « Est-ce cliniquable ? » Si oui, on l'envoyait à la clinique.
On peut certes poser la question des poches de productivité de l'hôpital public – comme on l'entend depuis longtemps. Il se trouve qu'elles sont vides. Mieux vaudrait s'atteler à des chantiers que vous refusez obstinément de voir en face : la gouvernance de l'hôpital public et l'hôpital en tant qu'entreprise, autrement dit les modalités de la tarification. Il faudrait aussi s'intéresser aux questions de démographie médicale, et donc s'attaquer aux déserts médicaux et à l'absence de régulation de l'installation des médecins, qui constituent un frein considérable au tournant ambulatoire – condition nécessaire pour mener certaines réformes.
Nous ne proposons pas une vision comptable, mais une vision de santé publique. Il s'agit de donner à l'hôpital public les moyens de dispenser les soins que la population réclame. Nous nous plaçons du point de vue des besoins en santé, alors que vous êtes obsédés par la seule offre de santé.