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Intervention de Paul-André Colombani

Séance en hémicycle du mardi 24 octobre 2023 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul-André Colombani :

Le PLFSS pour 2024 n'est pas un grand cru – et c'est un euphémisme. C'est la première fois qu'un tel texte n'est pas voté en commission et le 49.3 devrait sous peu interrompre nos débats. Le texte que vous avez présenté cette année est très loin d'être à la hauteur des enjeux d'un système de santé qui ne cesse de se détériorer.

Certes, il prévoit de réaliser des économies, pour un montant de 3,5 milliards d'euros, mais au prix de l'accès aux soins et de l'intérêt des assurés sociaux.

D'abord, s'agissant de l'accès aux soins, bien que l'Ondam augmente, cette progression parviendra péniblement à compenser l'inflation. En outre, aucune des mesures que vous proposez n'est de nature à améliorer substantiellement l'accès aux soins dans nos territoires. Vous connaissez bien le refrain, puisque nous le répétons chaque année : il faut davantage de moyens humains et financiers pour l'hôpital public.

Si la question se pose dans tous les territoires, elle est encore plus prégnante en outre-mer et en Corse. Depuis 2017, le coefficient géographique de nos hôpitaux n'a pas été relevé. Il s'agit pourtant du principal levier permettant de rattraper notre retard structurel, mais également de compenser les surcoûts et les effets de seuil liés à l'insularité. Il est urgent de le rehausser. Je prendrai l'exemple du CHU de Guadeloupe, qui doit arbitrer entre le financement de la recherche et le paiement des fournisseurs. Du reste, nous avions proposé que ce coefficient soit fixé chaque année dans le PLFSS, pour ne pas éluder ce débat comme c'est le cas aujourd'hui. Je note cependant avec intérêt la proposition de M. le ministre de la santé et de la prévention. Je me tiens à son entière disposition pour travailler sur ce dossier qui est un marqueur politique important du groupe LIOT.

Ce PLFSS réalise également des économies au détriment de l'intérêt du patient. L'hôpital public et la médecine de ville subissent de plein fouet les conséquences de cette logique d'économie budgétaire. Sous couvert d'un renforcement des modalités de lutte contre la fraude, en réalité, les droits des assurés sociaux sont affaiblis. J'en veux pour preuve l'article 27 qui prévoit plusieurs mesures qui sont autant de lignes rouges. La possibilité de mettre un terme aux arrêts de travail sur la base d'un rapport rendu par un médecin diligenté par l'employeur, en l'absence d'un examen médical par le médecin-conseil, fait courir un risque important de conflit d'intérêts.

J'ai proposé en commission de créer un agrément qui serait délivré par l'assurance maladie aux médecins ayant suivi une formation spécifique. En l'absence d'un contrôle effectué par un praticien conseil, il est dans l'intérêt de l'assuré que le contrôle médical soit pratiqué par un médecin agréé, et donc formé à ce genre de situation.

De même, votre texte, en proposant de déléguer le contrôle des arrêts de travail, témoigne de votre abdication face au manque de moyens humains. Il est inacceptable que les indemnités journalières d'un salarié puissent être suspendues, sur le fondement d'un simple entretien téléphonique, sans examen médical. Au contraire, il faut recruter de nouveaux praticiens conseils pour assurer un contrôle efficace. Or toutes les solutions que nous avons proposées ont été balayées d'un revers de la main.

Or nos inquiétudes sont vives, notamment en ce qui concerne l'article 27, dont l'alinéa 4 bafoue le principe du contradictoire dans le cadre des sanctions infligées aux médecins libéraux par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM). Cet article cristallise la colère de ces derniers dans un contexte déjà très tendu du fait de l'échec du renouvellement de la convention. Il tend en effet à supprimer l'avis de la commission des pénalités financières afin de réduire les délais d'instruction et prive ainsi les médecins de la possibilité de se défendre de manière équitable. Cette mesure disproportionnée va à l'encontre de l'esprit de la lettre de cadrage du ministre de la santé.

Je pourrais en dire autant de l'article 7, qui ouvre la porte à l'instauration d'un délit statistique pénalisant les praticiens qui font face à un afflux important de patientèle, notamment dans les déserts médicaux. Il appelle donc, selon moi, une caractérisation plus précise de la fraude, qui permettrait de sanctionner les fraudeurs sans jeter l'opprobre sur l'ensemble de la profession.

Je relèverai néanmoins certaines mesures que nous voyons d'un bon œil ; je pense au renforcement du volet prévention, grâce notamment à la vaccination contre le papillomavirus au collège, et à l'accès gratuit aux préservatifs et aux protections menstruelles réutilisables.

Toutefois, vous l'aurez compris, nous considérons que le compte n'y est pas et que si la copie n'est pas revue en tenant compte des marqueurs que nous avons défendus en commission, nous nous opposerons à ce texte.

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