Monsieur le ministre, vous avez évoqué avec raison la dynamique des dépenses d'arrêt maladie : il est vrai que les arrêts maladie augmentent depuis une décennie, et, face à ce phénomène, vous en appelez à la responsabilisation de chacun. Mais quelle est la première cause de cette hausse ? Dans les annexes au PLFSS, nous lisons que cette croissance des dépenses d'indemnités journalières liées aux maladies s'explique principalement par l'augmentation et le vieillissement de la population active. Ce sont les réformes des retraites successives qui contraignent les gens à vieillir au travail, à y être malades et à être en arrêt maladie. Votre politique impose une triple peine : les salariés, dont la santé est fragilisée par le travail, seront pénalisés s'ils se retrouvent en arrêt maladie, puis devront partir en retraite plus tard. C'est dire l'injustice de cet enchaînement !
La deuxième cause de la hausse des arrêts maladie est le mal au travail. Dans ce domaine, il y a une spécificité française que montrent les comparaisons internationales : elle concerne les accidents du travail, mais également le stress, le port de charges lourdes et d'autres composantes des conditions de travail. Ce mal au travail coûte environ 100 milliards d'euros par an à notre économie. Le Président de la République et le Gouvernement avaient reconnu au printemps cette situation et avaient pointé la nécessité d'un nouveau pacte de la vie au travail. Les médecins auront des objectifs de limitation des arrêts de travail ; l'un d'entre eux s'exprime ainsi : « Mes patients bossent en usine ou en abattoir, ils sont manutentionnaires ou soignants, ils sont usés par l'intensité du travail mais ils attendent d'être au bout du bout pour venir me voir, et je ne me vois pas leur dire que je réduis la durée de leur arrêt car j'ai atteint mon quota. »
La philosophie de vos mesures sur les indemnités journalières est mauvaise : lors des assises du travail, les acteurs ont tous demandé que l'on revoie l'organisation du travail, en concertation avec les salariés. Or vous ne vous penchez pas sur la réorganisation collective du travail, vous responsabilisez les individus, c'est-à-dire que vous les culpabilisez et que vous faites reposer la faute sur eux et sur les médecins qui seraient leurs complices.