Intervention de Gabriel Attal

Réunion du lundi 26 septembre 2022 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics :

Bruno Le Maire a rappelé les aléas auxquels nous faisons face, en matière géopolitique et économique. Si l'on ne fait pas de politique avec une boule de cristal, on peut en faire avec une boussole. La nôtre, depuis le début de ces crises, est la protection des Français. Le budget que nous vous présentons est ainsi un budget de protection.

Le premier axe de protection est d'aider les Français à faire face à l'urgence des fins de mois. Le bouclier tarifaire, détaillé par Bruno Le Maire, représente une des dépenses importantes du budget pour 2023. L'indexation du barème de l'impôt sur le revenu est aussi une mesure forte pour la protection du pouvoir d'achat des Français. J'ai parfois entendu dire que c'était une mesure automatique, appliquée chaque année. Or ce n'est pas le cas : certaines années, le barème n'a pas été indexé sur l'inflation, notamment pour les revenus de 2011 et de 2012. Ensuite, face à un tel niveau d'inflation et compte tenu des implications pour les finances publiques, convenez que la question peut se poser. Très concrètement, plus de 6 milliards d'euros – j'avais annoncé 6,2 milliards, mais ce sera en réalité 6,4 milliards – ne seront pas prélevés sur les Français au titre de l'impôt sur le revenu.

Le deuxième axe de protection est la poursuite du réarmement des services régaliens. Nous prévoyons ainsi 3 milliards supplémentaires pour la défense, conformément à la loi de programmation militaire, et 1,4 milliard de plus pour le ministère de l'intérieur, suivant la trajectoire inscrite dans la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI), ce qui signifie plus de moyens pour les équipements et les technologies numériques, pour renforcer la présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique, mais aussi plus de moyens pour les douanes, auxquelles je suis très attaché, en tant que ministre de tutelle – les douaniers bénéficieront de 144 millions supplémentaires entre 2022 et 2025, pour renforcer les équipements mobiles et améliorer notre flotte aérienne et navale. Enfin, nous poursuivrons le renforcement des moyens du ministère de la justice : ils augmenteront de 8 % pour la troisième année consécutive.

Troisième axe de protection, nous préparons l'avenir, en faisant le pari de l'éducation, en gagnant la bataille du plein emploi et en accélérant la transition écologique. Nous prévoyons une augmentation de 3,7 milliards d'euros pour l'éducation. Comme nous nous y étions engagés dans le cadre de la campagne présidentielle, aucun enseignant ne gagnera moins de 2 000 euros net par mois à compter de la rentrée prochaine. Pour ce qui est de la bataille du plein emploi, nous nous sommes fixé pour objectif de la gagner à l'horizon 2027 : 6,7 milliards d'euros de crédits supplémentaires seront investis pour l'emploi et pour l'apprentissage, notamment en vue d'arriver à un million d'apprentis d'ici à 2027. Cette bataille, je le redis, nous ne la gagnerons pas par davantage de pression fiscale. C'est la raison pour laquelle nous avons d'ores et déjà rendu 54 milliards aux ménages et aux entreprises au cours des cinq dernières années. Nous allons continuer à baisser les impôts lorsqu'ils sont néfastes au développement économique de notre pays, en supprimant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Et puis, préparer l'avenir, c'est protéger la planète. Nous agissons, vous le savez, d'une manière résolue en ce sens. Outre le fonds de 1,5 milliard d'euros qui a été annoncé par la Première ministre, il y aura 500 millions d'euros de plus pour MaPrimeRénov' et 250 millions supplémentaires pour le plan Vélo.

Le quatrième axe de protection consiste à protéger les comptes publics. Nous sommes sortis du « quoi qu'il en coûte » pour entrer dans le « combien ça coûte ». Un euro dépensé est un euro raisonné, évalué et utile à la protection des Français. Nous avons une trajectoire, fixée dans le cadre du programme de stabilité. Nous tiendrons l'objectif de 5 % de déficit l'an prochain, après avoir tenu l'objectif pour cette année. Je rappelle que le déficit était de près de 9 % en 2020 : nous l'avons ramené à 6,4 % en 2021, et il est de 5 % en 2022. Il sera, de même, de 5 % en 2023, et nous serons revenus sous les 3 % en 2027. Nous le ferons, comme Bruno Le Maire l'a dit, en suscitant de l'activité économique par des réformes ambitieuses qui permettent d'améliorer l'emploi dans notre pays – plus il y a de Français qui travaillent, plus les recettes sont élevées et moins il faut de dépenses de réparation pour accompagner des Français qui ne travaillent pas –, mais aussi en maîtrisant la dépense publique. Elle diminuera de 2,6 % en volume en 2023, et la part des dépenses publiques rapportée au PIB se réduira, puisqu'elle passera de 57,6 % à 56,6 % du PIB l'an prochain, puis à 53,8 % en 2027. Nous poursuivrons, par ailleurs, le travail d'évaluation de la qualité de la dépense publique. Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit des outils supplémentaires : son article 7 vise à systématiser les évaluations des dépenses fiscales avant leur éventuelle reconduction. C'est un outil dont le Parlement devra pleinement se saisir : nous sommes tous responsables de nos finances publiques.

Répondre à l'urgence, financer l'essentiel, préparer l'avenir et tenir les comptes, voilà les quatre axes qui structurent notre action et la stratégie que nous vous proposons pour protéger les Français dans cette période exceptionnelle.

Nous avons parfaitement conscience que les défis sont immenses, et c'est précisément pour cela que nous devons inventer ensemble une nouvelle méthode : c'est ce que nous avons voulu en lançant les dialogues de Bercy. Nous verrons dans les prochaines semaines si les pistes que nous avons dessinées ensemble permettent d'enrichir le texte. Je ne minimise en rien nos désaccords sur le fond : il y aura toujours ceux qui veulent augmenter les impôts et ceux qui veulent les baisser. Mais ce n'est pas parce qu'on n'est pas d'accord sur tout qu'on ne peut discuter de rien. Et ces réunions, qui ont duré plus de dix heures et auxquelles une grande partie d'entre vous étaient présents, ont montré que nous étions capables de nous parler, de travailler ensemble et d'identifier des propositions et des solutions au service des Français.

De fait, le texte qui vous est présenté n'est pas celui qui avait été prévu avant le lancement des dialogues de Bercy, et il sera encore enrichi par nos travaux. Toute une série de mesures ont été imaginées à la suite de nos échanges. Ainsi, nous avons décidé de suspendre l'application de l'actualisation des bases locatives, qui était critiquée de toutes parts ; accepté de revaloriser plus encore que prévu les crédits de MaPrimeRénov' et engagé un travail de révision de son barème pour soutenir davantage les rénovations globales ; enrichi le paquet « collectivités locales », notamment en échelonnant sur deux ans la suppression de la CVAE et en décidant de la compenser par une fraction de TVA.

Caroline Cayeux et moi-même venons d'annoncer devant le Comité des finances locales que nous allons renforcer les dotations de péréquation au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF) l'an prochain, à hauteur de 210 millions d'euros ; c'est encore une proposition qui avait été émise dans le cadre des dialogues de Bercy – j'en remercie Christine Pires Beaune. Autrement dit, nous garantissons la stabilité de la DGF au niveau non seulement national, comme nous le faisions depuis cinq ans, mais aussi individuel – pour chaque collectivité –, comme le souhaitait également Jean-René Cazeneuve, grâce à un abondement des dotations de péréquation : la péréquation ne se fera plus « sur le dos » de la dotation forfaitaire, donc de certaines collectivités.

Nous souhaitons poursuivre un travail aussi partenarial que possible, au service de la protection de nos concitoyens.

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