Madame Abitbol, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie vivement de vous être rendue disponible pour cette audition.
Vous êtes, d'une certaine manière, à l'origine de la création de cette commission d'enquête car votre témoignage, en 2020, dans votre livre Un si long silence, a été le point de départ d'une immense vague de dénonciations de violences en tout genre subies par des jeunes sportifs dans de nombreuses fédérations.
Comme vous le savez, l'Assemblée nationale a choisi de créer cette commission d'enquête à la suite de ces très nombreuses révélations publiques et de divers scandales judiciaires ayant trait à la gestion de certaines fédérations.
Nous avons entamé le 20 juillet 2023 nos travaux sur l'identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du monde sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif.
Ces travaux s'articulent autour de trois axes : l'identification des violences physiques, sexuelles ou psychologiques dans le sport ; l'identification des discriminations sexuelles et raciales dans le sport ; et l'identification des problématiques liées à la gouvernance financière des fédérations sportives et des organismes de gouvernance du monde sportif bénéficiant d'une délégation de service public.
Vous êtes, bien évidemment, concernée au premier titre puisque vous êtes la première grande championne internationale à avoir dénoncé des faits de viol, attouchements et harcèlement moral de la part de votre entraîneur, M. Gilles Beyer, lorsque vous aviez entre 15 et 17 ans.
Dans votre livre, vous avez expliqué dans le détail la manière dont ces faits se sont produits, votre incapacité à verbaliser ces horreurs à l'époque et l'amnésie traumatique dont vous avez été victime pendant de nombreuses années. Votre témoignage est très poignant, non seulement du fait de la gravité des sévices auxquels vous avez été soumise, mais également parce qu'il montre la solitude dans laquelle vous vous êtes trouvée à l'époque, malgré des parents et amis très proches. L'irresponsabilité dont a bénéficié votre agresseur du fait de son aura dans la sphère du patinage artistique et de l'omerta entourant son comportement vicieux envers les jeunes patineuses, manifestement bien connu, sont également très choquantes. Enfin, l'absence de soutien, de la part de la fédération comme au plus haut niveau de l'État à l'époque des faits, est très grave. Pouvez-vous nous en reparler aujourd'hui ? Les réformes entreprises au ministère des sports comme au sein de la fédération depuis votre témoignage vous paraissent-elles adaptées à la situation ?
Vous plaidez aujourd'hui pour l'imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineurs et la reconnaissance de l'amnésie traumatique, et vous avez créé voilà environ un an une association, La voix de Sarah, pour poursuivre votre combat contre les violences sexuelles. Pouvez-vous nous expliquer votre démarche ?
Je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et qu'elle est retransmise en direct sur le site de l'Assemblée nationale.
L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.