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Intervention de Jérémie Patrier-Leitus

Réunion du mardi 4 octobre 2022 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérémie Patrier-Leitus :

« Ma patrie, c'est la langue française. » Ce mot d'Albert Camus aurait pu être celui d'Hélène Carrère d'Encausse, secrétaire perpétuel de l'Académie française à laquelle la nation a rendu un dernier hommage hier après-midi. Elle rappelait à chacun de ses interlocuteurs que ce n'était pas elle qui était immortelle mais la langue française, dont elle avait fait le combat de sa vie. Nous souhaitions saluer sa mémoire.

Les députés du groupe Horizons accordent une grande importance au respect de la langue française et aux combats contre ses déformations militantes. Dès 2017, Édouard Philippe, alors Premier ministre, a publié la circulaire relative aux règles de féminisation et de rédaction des textes publiés au Journal officiel. Alors que les expérimentations liées à l'écriture inclusive n'en étaient qu'à leurs prémices et que son usage était limité, il a été le premier à imposer le respect des règles de grammaire et de typographie en vigueur dans les textes officiels, pour des raisons d'intelligibilité et de clarté de la norme.

Ce combat pour le maintien d'une langue écrite et parlée qui n'exclut pas une partie de la population avait ensuite été mené, en 2021, par mon collègue François Jolivet. Sa proposition de loi avait été cosignée par plus de 110 députés de divers bords politiques, dont près de 50 appartenant alors à La République en marche. Reprenant les termes de la circulaire d'Édouard Philippe, elle visait à exclure le point médian – et lui seul – des documents produits par les administrations, par les personnes et par les organismes chargés d'une mission de service public. Nous sommes toujours aussi déterminés à défendre la langue française, ce patrimoine immatériel que nous avons le devoir de transmettre à nos enfants, de génération en génération. La lutte contre les stéréotypes sexistes, pour légitime qu'elle soit, ne peut se faire au détriment de la lisibilité et de la beauté de la langue.

Si j'ai tenu à rappeler cette conviction des députés Horizons et cette lutte de longue date pour notre bien commun le plus précieux, c'est aussi pour souligner le fossé qui sépare notre démarche de la vôtre, monsieur le rapporteur. Car c'est une chose de promouvoir la beauté et la clarté de notre langue en luttant contre une écriture militante, artificielle et excluante ; c'en est une autre d'avoir voulu rendre illégales des écritures véritablement inclusives et qui ne posent aucun problème de compréhension, comme la double flexion et les termes épicènes.

En quoi la formule « mesdames les inspectrices et messieurs les inspecteurs » pose-t-elle problème au Rassemblement national ? En 2017, la circulaire d'Édouard Philippe préconisait de faire usage de cette double flexion dans certaines circonstances, notamment dans les offres de recrutement, pour ne pas marquer de préférence de genre.

Je ne comprends pas non plus votre opposition, même si vous venez de l'amender, aux termes épicènes, c'est-à-dire au choix d'employer un terme neutre plutôt qu'un mot exprimant le féminin et le masculin. Au prétexte de lutter contre l'idéologie wokiste, vous vous arc-boutez contre des avancées bienvenues et entrées dans l'usage courant, et ce, en vous fondant sur des arguments erronés : si la langue française n'est pas sexuée, comme l'affirme encore votre exposé des motifs, il existe des versions féminines pour plusieurs métiers. Pourquoi ne pas les utiliser ? L'Académie française elle-même, prenant acte d'un malaise dans la langue française, s'est prononcée en février 2019 en faveur de la féminisation des noms de métiers. Pourtant, on ne peut pas accuser nos immortels, gardiens de la langue française, d'un goût débridé pour les dernières innovations linguistiques.

En somme, en voulant combattre certains néologismes, vous inventez des problèmes qui n'existent pas, excepté dans de petits cercles qui ne représentent qu'eux-mêmes et n'ont en aucun cas la charge de rédiger et de publier des actes législatifs, civils ou administratifs.

En conclusion, monsieur le rapporteur, nous ne vous avons pas attendu. Je répète l'immense fierté que nous avons, au groupe Horizons, que le Premier ministre Édouard Philippe ait publié, dès 2017, cette circulaire en ligne avec les valeurs que nous portons. Elle permet d'imposer des règles claires, qui n'ont pas vocation à être fixées par les parlementaires. Il faut appliquer cette circulaire.

En l'état, les députés Horizons voteront contre cette proposition de loi, mais nous ne voterons pas les amendements de suppression.

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