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Intervention de Roger Chudeau

Réunion du mardi 4 octobre 2022 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoger Chudeau :

L'écriture dite inclusive s'est répandue de manière virale dans la société française, à l'université et dans certaines administrations publiques. Le propos de ce texte n'est pas d'ouvrir un débat entre grammairiens ou d'instituer on ne sait quelle police de la langue. La représentation nationale n'a ni ce type de compétence ni cette prétention. Notre propos est de défendre la langue de la nation, une langue parlée, chantée, écrite, qui est un bien commun également partagé par tous les citoyens français et par 500 millions de francophones.

Les fondements de l'écriture inclusive ne relèvent pas, comme voudraient nous le faire croire ses partisans les plus habiles, d'une entreprise de modernisation, d'évolution ou d'adaptation de la langue française, mais sont une démarche idéologique, une entreprise politique concertée et méthodique de déconstruction de notre langue. Cette entreprise repose sur un confusionnisme linguistique qui croit naïvement que le langage doit refléter ce qu'il désigne et sur une vision dévoyée de l'égalité entre les hommes et les femmes, ainsi que sur un communautarisme rampant, ou clairement proclamé, qui ramène chacun à sa communauté d'appartenance – en l'occurrence, le sexe – au lieu de viser le sentiment d'appartenance à une humanité commune. En ce sens, l'écriture inclusive est un défi aux universaux de la République française.

Ce constat a conduit Hélène Carrère d'Encausse à considérer que l'écriture inclusive était un péril mortel pour la langue française. Dans l'hommage solennel que la nation lui a rendu hier, le Président de la République a insisté sur ce que notre langue devait à l'académicienne pour sa défense et son illustration.

L'Académie française, dans sa lettre ouverte sur l'écriture inclusive du 7 mai 2021, écrit : « Une langue procède d'une combinaison séculaire de l'histoire et de la pratique, ce que Lévi-Strauss et Dumézil définissaient comme un “équilibre subtil de l'usage”. » Elle appelle « aberration linguistique » une écriture qui ne peut être ni lue ni dictée, une écriture qui maltraite les règles élémentaires de la syntaxe et malmène notre corpus nominal – il y a « inspectrice, inspecteur », mais il y a aussi « sapeur-pompier, sapeuse-pompière », particulièrement élégant ! –, une écriture qu'aucun francophone d'Afrique ne veut ni ne peut adopter du point de vue culturel, une écriture que nul élève éprouvant ne serait-ce qu'une légère difficulté à lire ou à écrire ne saurait comprendre. Loin d'être inclusive, cette écriture est exclusive et excluante.

C'est pourquoi de nombreux parlementaires venus d'horizons politiques différents – LaREM sous la précédente législature, LR, RN – ont estimé ces dernières années que la promotion d'une langue juste, neutre et stable, n'est pas une obsession réactionnaire ou rétrograde, mais relève de la défense d'un bien commun dont nous ne sommes pas les propriétaires. Nous ne sommes pas les propriétaires de la langue française, mais nous en sommes les légataires, les dépositaires, et nous avons le devoir sacré de la protéger et de la transmettre.

Cette proposition de loi vise à mettre un terme à ce qui, selon l'Académie française, offusque la démocratie du langage, et à une aberration linguistique.

Porteur initial de cette proposition de loi, j'estime que le projet idéologique de l'écriture inclusive n'est pas égalitaire mais diversitaire, c'est-à-dire communautaire, séparatiste dirait le Président de la République. Les promoteurs de l'aberration inclusive considèrent que le français serait une langue viriliste, androcentrée, patriarcale et blanche. Ils entendent visibiliser, dans la langue, le féminin, le non genré, le fluide, le queer, le non blanc. À l'énoncé de ces prétentions, on mesure le degré d'absurdité, le caractère abscons de cette novlangue pseudo-académique.

L'écriture inclusive n'est qu'un des aspects de l'entreprise wokiste, qui entend effacer, au bénéfice de communautés supposément opprimées, ce qui constitue la communauté française, cette expression ayant une valeur légale. À cette entreprise, j'estime qu'il est de notre devoir de représentants du peuple français de nous opposer.

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