Les tarifs bleus, jaunes et verts d'EDF assuraient la bonne information du consommateur ; ces prix couvraient les coûts de production, de maintenance et d'investissement du système électrique français ; ils reposaient sur la réalité économique d'un mix électrique fondé sur l'alliance du nucléaire et de l'hydraulique ; ils étaient un atout pour le bien-être des Français et la compétitivité des entreprises. Le modèle électrique français démontrait son efficacité, il était envié dans le monde entier, puis l'Union européenne l'a saccagé.
Avec la complicité des gouvernements successifs, les dogmes de la concurrence, imposés par la Commission européenne, ont conduit au démantèlement de notre fleuron national, EDF-GDF. Ils ont conduit à la création du dispositif de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh), pour faire émerger une concurrence artificielle qui prospère sur la rente nucléaire d'EDF. Ils ont aussi conduit à l'extinction progressive des tarifs réglementés et à l'indexation du prix de l'électricité française sur celui du gaz au niveau européen. Le bilan de la libéralisation du marché français de l'énergie est sans appel : les consommateurs sont pénalisés et l'offre d'électricité dans notre pays frôle la pénurie.
Parlons des consommateurs d'abord. Entre 2007 et 2022, en euros courants, les prix de l'électricité ont bondi de 81 % pour les ménages et de 110 % pour les entreprises. Ceux du gaz ont également augmenté de 81 % pour les ménages et de 135 % pour les entreprises. Je ne parle même pas des hausses des prix depuis le début de l'année 2023 ! Les consommateurs se retrouvent d'autant plus pénalisés que les tarifs réglementés de vente de l'électricité ont été restreints aux seuls particuliers et aux très petites entreprises (TPE) ; ceux du gaz ont été supprimés le 1er juillet dernier. Imposer la concurrence sur le marché français de l'énergie devait bénéficier aux consommateurs grâce à la baisse des prix ; c'est un échec puisque ces derniers n'ont cessé de flamber.
Parlons ensuite de l'offre d'électricité. L'Arenh est un mécanisme bureaucratique instauré pour contraindre EDF à vendre 25 % de son électricité nucléaire à ses concurrents directs et à un prix dérisoire, qui ne couvre même pas ses coûts de production. Madame la ministre, l'Arenh est une aberration qui a conduit à renchérir artificiellement les tarifs réglementés de vente de l'électricité, pour permettre l'émergence d'une fausse concurrence ; il a également conduit à mettre en péril la sécurité d'approvisionnement électrique du pays. En une douzaine d'années d'application de l'Arenh, non seulement les fournisseurs alternatifs n'ont pas investi dans les moyens de production qui leur sont propres – ils profitent d'une situation de rente –, mais ce manque à gagner de plusieurs milliards d'euros annuels a lourdement pénalisé EDF.
Plusieurs anciens PDG d'EDF qualifient eux-mêmes l'Arenh de poison, de monstruosité, de dispositif pernicieux ou encore de pilule empoisonnée. Je les comprends : avec une dette de 65 milliards d'euros, comment voulez-vous que le groupe EDF investisse massivement dans de nouveaux moyens de production ? Pour les raisons que je viens d'évoquer, nous avons le devoir d'accélérer le processus de suppression de l'Arenh pour qu'il arrive à son terme bien avant la date prévue, le 31 décembre 2025.