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Intervention de Anne-Laure Babault

Séance en hémicycle du jeudi 6 octobre 2022 à 9h00
Lutte contre les plastiques dangereux pour l'environnement et la santé — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne-Laure Babault :

Je tiens tout d'abord à adresser mes remerciements au rapporteur, M. Pahun, pour le travail qui a précédé la présentation de cette proposition de loi, ainsi que pour son engagement sans faille en faveur de la cause environnementale. Je m'inscris totalement dans cet engagement.

Le groupe Démocrate et indépendants est heureux de voir figurer ce texte à l'ordre du jour de sa niche parlementaire. Il vient renforcer nos exigences en matière de réduction des déchets plastiques, nocifs pour l'environnement et la santé. Il a fait l'objet de nombreuses auditions tant auprès des défenseurs de l'environnement que des recycleurs et industriels.

Selon les estimations, plus de 150 millions de tonnes de plastique polluent nos océans, ce qui veut dire que l'équivalent d'un camion poubelle y est déversé chaque minute. Quelque 50 % des déchets plastiques retrouvés en mer sont des emballages à usage unique, qui suivent le fil de l'eau des fleuves à partir de nos égouts, canalisations et routes pour terminer leur parcours dans les océans.

Leur dégradation en microplastiques et en nanoplastiques affecte les écosystèmes marins et leur capacité à capter le carbone. Cette dégradation tue aussi de nombreuses espèces marines. Nous avons tous en tête l'image de cadavres d'animaux remplis de plastiques. L'enjeu est donc grand, tant contre le réchauffement climatique que pour le respect du vivant. Il est urgent d'agir !

La loi « climat et résilience » de 2021 prévoit d'interdire les emballages en polystyrène d'ici à 2025, quand ils ne pourront pas être intégrés dans une filière de recyclage. Notre texte initial prévoyait l'interdiction immédiate du polystyrène. Cette substance particulièrement nocive pour notre environnement se dégrade difficilement dans l'océan en raison de la complexité de sa composition et de sa friabilité ; 30 % des plastiques retrouvés dans l'océan sont des polystyrènes.

Eu égard à ces éléments, l'interdiction du polystyrène paraissait donc assez évidente. Néanmoins, nous avons hérité d'un modèle de consommation d'après-guerre, qui rencontre maintenant ses limites dans de nombreux domaines. Nous avons fait du « tout plastique » durant soixante-dix ans : des emballages jetables à partir d'énergies fossiles, longtemps destinés à être enfouis ou incinérés. Aujourd'hui, nous aimerions passer au « zéro plastique » en claquant des doigts.

Personnellement je le souhaite, et j'imagine que vous êtes nombreux ici dans ce cas. Cependant, il n'est pas si simple de faire machine arrière : s'il existe des substituts plus vertueux au polystyrène, ils sont encore techniquement insatisfaisants pour les industriels. Il nous faut donc encore innover pour aller vers des solutions biosourcées, à usages multiples et recyclables.

Dans la continuité de la loi AGEC, le Gouvernement a publié l'an dernier sa stratégie dite 3R pour réduction, réemploi, recyclage, qui visait à faire en sorte que 100 % des emballages plastiques soient recyclables à l'horizon de 2025.

Notre proposition de loi vient donc renforcer cet objectif en lui donnant une portée contraignante : elle oblige les industriels à développer une filière de recyclage pour leurs emballages plastiques, sous peine d'interdiction. Cela représente une réelle avancée dans la mise en œuvre de la stratégie 3R.

Cette volonté de protection de l'environnement se retrouve dans l'article 3, qui impose un affichage, indiquant la présence de plastique dans l'emballage et les effets nocifs sur l'environnement qu'il pourrait potentiellement produire, et dans l'article 4, qui vise à limiter la dégradation des espaces protégés par la pollution plastique.

Enfin, l'article 2 tend à protéger la santé des Françaises et des Français en interdisant les composés perfluorés des produits de notre quotidien : emballages et contenants alimentaires, ustensiles de cuisine, petits électroménagers, jouets et articles de puéricultures, couches pour bébés et protections d'hygiène intime. Ces produits sont visés par une restriction ou une interdiction européenne dès 2025.

Au-delà de notre proposition de loi, il est essentiel que chaque acteur de la chaîne prenne sa part d'un projet global de sobriété.

Tout d'abord, l'industrie de la plasturgie doit innover en limitant la superposition de couches de plastiques et l'ajout d'additifs qui compliquent le tri et le recyclage. Elle doit aussi explorer les possibilités offertes par les matériaux biosourcés.

Ensuite, les industriels ont la responsabilité de choisir des solutions vertueuses pour l'environnement avant tout. Dans l'industrie agroalimentaire, par exemple, il est nécessaire de favoriser des formats dits familiaux, notamment pour les produits laitiers comme c'est le cas dans d'autres pays européens, ainsi que le vrac et la consigne.

Dans ce processus, le consommateur joue un rôle majeur. Par ses actes d'achat, il dispose d'un pouvoir d'orientation des entreprises. Il faut donc l'informer au mieux pour lui permettre de prendre conscience de son impact et de choisir en étant acteur de sa consommation.

Il s'agit aussi de développer une économie circulaire des emballages plastiques. Ces nouvelles filières doivent ainsi permettre le retour au contact alimentaire des produits recyclés, afin de cesser de faire pression sur les ressources naturelles pour produire de nouveaux emballages.

Enfin, les pouvoirs publics doivent agir pour accélérer la collecte de tri, rendre les consignes plus lisibles, mettre à disposition davantage de bornes de collecte, assurer un suivi des dispositifs de tri de la poubelle jusqu'au centre de recyclage.

En résumé, c'est l'ensemble des acteurs qui se doit d'être responsable face aux enjeux climatiques.

Cette sobriété plastique est par ailleurs tout à fait cohérente avec notre objectif de réduction de notre consommation énergétique d'ici à 2050. En effet, une étude récente nous apprend que l'industrie de la plasturgie représente près de 9 % de la consommation de gaz fossile et 8 % de la consommation de pétrole de l'Union européenne en 2020. Qui plus est, les emballages plastiques représentent 40 % de l'industrie de la plasturgie et, par conséquent, ils constituent aussi un moyen de réduire notre empreinte carbone.

Le groupe Démocrate et indépendants sera particulièrement vigilant à la bonne mise en place des filières de recyclage à l'horizon de 2025. Le rendez-vous est donné aux industriels et il doit être tenu. Aucune prolongation ne sera accordée si nous voulons être crédibles dans notre combat contre le réchauffement climatique.

En parallèle, nous appelons à la création d'un groupe de travail transpartisan, associant les industriels, les associations environnementales et de consommateurs ainsi que les élus afin d'accompagner cette transition.

Il faut ajouter à cela une méthode impérative : évaluer de manière systématique l'impact carbone de chaque solution afin de prendre des décisions étayées notamment par l'analyse de cycle de vie de chaque produit avant sa mise sur le marché. Nous sommes au tout début de cette démarche, mais ce travail est incontournable si nous voulons prendre les bonnes décisions pour l'avenir de nos enfants.

Le groupe Démocrate et indépendants votera donc en faveur de cette proposition de loi, en pleine cohérence avec son engagement écologique. À la veille du 1er janvier 2025, nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas, il reste deux ans !

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