M. le président du Haut Conseil des finances publiques, je vous remercie pour cet avis qui éclaire le débat national, à quelques heures de l'examen du PLPFP en commission. Je note que cet avis est balancé entre deux types d'appréciation. D'une part, vous jugez optimistes la prévision de croissance du gouvernement pour 2024, qu'il a toutefois récemment modérée, ainsi que ses estimations d'écart de production et de croissance potentielle sur la période de programmation. D'autre part, vous jugez plausibles la prévision de croissance du gouvernement pour 2023, ce qui est nouveau, ainsi que ses estimations d'inflation pour 2023 et 2024.
S'agissant des finances publiques, vous relevez que la nouvelle trajectoire du gouvernement est plus ambitieuse qu'il y a un an, tant sur le déficit public que sur l'endettement. Vous considérez toutefois que cette ambition demeure mesurée. Il est possible de partager ce point de vue, mais il faut symétriquement reconnaître que nous avons traversé des crises exceptionnelles, à une fréquence exceptionnelle. En outre, l'impératif de l'investissement en faveur de la transition écologique s'impose à nous.
Je ne reviendrai pas sur la nécessité pour notre pays de disposer d'une LPFP, mais me concentrerai sur un certain nombre de questions. Longtemps, la prévision de croissance du gouvernement pour 2023, fixée à 1 %, a été considérée par tout le monde comme optimiste, y compris par le HCFP. Vous l'estimez désormais plausible, tout comme un certain nombre de conjoncturistes dans la période récente. Que s'est-il passé selon vous en 2023 dans l'économie française pour que ce qui semblait hors d'atteinte soit in fine constaté ? Y a-t-il des leçons à en tirer pour l'avenir, y compris pour 2024 ?
Ensuite, vous considérez que le gouvernement est optimiste s'agissant de l'écart de production en 2023 et du niveau de la croissance potentielle. Il est vrai que les prévisions gouvernementales se situent en haut des fourchettes, même si bon nombre de conjoncturistes produisent en la matière des prévisions peu éloignées de celles du gouvernement, par exemple l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour l'écart de production et l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) pour la croissance potentielle. De plus, les écarts de prévision entre conjoncturistes eux-mêmes sont particulièrement étonnants. Vous qui les interrogez, comment analysez-vous ces écarts ? Quelle confiance peut-on avoir dans les appareillages théoriques censés approcher ces grandeurs non directement observables ?
Par ailleurs, vous notez que, de 2025 à 2027, le gouvernement propose désormais d'associer aux trajectoires de dépenses de l'État et des administrations de sécurité sociale un exercice de revues de dépenses fondé sur l'obligation de trouver au total 12 milliards d'euros d'économies, chacune de ces trois années. Eu égard à la revue des dépenses que le gouvernement a réalisée en 2023 – je pense comme vous que l'exercice est largement perfectible –, comment faudrait-il procéder pour progresser rapidement et collectivement en la matière ?
Par ailleurs, les collectivités territoriales seraient exemptées d'un tel exercice de revues des dépenses, associé à une obligation de résultats en milliards d'euros. Elles seraient d'ailleurs exemptées de tout cadre contraignant concernant l'évolution de leurs dépenses de fonctionnement. Pensez-vous que l'obligation qui pèse sur elles d'exécuter des budgets en équilibre de fonctionnement soit suffisante pour qu'elles contribuent à l'effort de redressement de nos finances publiques ? À cet égard, l'exécution 2023 de leurs dépenses montrera-t-elle une baisse en volume de leurs dépenses comme prévu dans la trajectoire ?
Enfin, au mois d'avril dernier, la Commission européenne a publié des propositions de réforme de l'encadrement européen des politiques budgétaires, que l'avis publié par votre institution prend le soin d'exposer. Quel regard portez-vous sur ces propositions ? Quels seraient les avantages et les inconvénients de ces règles dans l'absolu ou par rapport au cadre actuel ? Et quelles modifications de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) pourraient-elles appeler ?