Je suis l'un des fondateurs de l'ONG Pollinis, qui se bat pour enrayer l'extinction des insectes pollinisateurs et de toute la biodiversité animale et végétale qui en dépend. Je voudrais faire passer un message très politique : la difficulté de réduire la consommation de pesticides n'est pas seulement due à des verrous sociotechniques ou à une manière de produire dont les agriculteurs ne voudraient pas se débarrasser. Les solutions alternatives existent. Leur généralisation demanderait peu d'efforts au regard des enjeux de la crise écologique, de la crise de la biodiversité et de la crise climatique.
Le système actuel est avant tout le résultat de politiques publiques, de recherches publiques, de subventions publiques. Le système agroalimentaire est largement soutenu par les citoyens. Ce que la loi a mis en place, la loi peut le faire évoluer. L'agriculture doit passer par une évolution des politiques publiques. Au-delà des problèmes techniques et organisationnels, le nécessaire changement du mode de production entraînera inévitablement des pertes pour les acteurs économiques dominants des filières agricoles. Je ne parle pas seulement des agriculteurs, mais des multinationales, comme celles de l'agrochimie, qui dominent totalement le système d'évaluation et d'autorisation des pesticides au niveau européen. Il faut prendre conscience du fait qu'il y aura des perdants, que le système qui doit être mis en place entraînera des pertes économiques, qu'il faudra peut-être envisager d'éponger. Le système a été mis en place politiquement, il doit être défait politiquement.