J'apporterai deux compléments. La RPD est aujourd'hui due non seulement par les acheteurs finaux de produits phytopharmaceutiques, mais aussi par les vendeurs de ces produits. Le mécanisme est bien construit. Certains trouveront que le taux est déjà élevé, mais il ne représente en réalité qu'une faible part du coût des produits phytopharmaceutiques et n'est donc pas de nature à modifier significativement les décisions économiques, car il enchérit certes le prix, mais pas dans des proportions importantes. Des économistes ont donc examiné l'élasticité prix des acheteurs de phyto. Ces travaux, cités dans notre rapport, montrent qu'il faudrait un montant de RPD très élevé pour modifier significativement la décision des acheteurs. Cette solution, bien qu'elle existe, est donc problématique.
Par ailleurs, comme l'a rappelé tout à l'heure M. Deprost, l'argent collecté au titre de la RPD ne revient pas dans la poche des agriculteurs car, pour partie, il finance des actions d'environnement visant notamment les agences de l'eau, qui disposent ainsi de moyens destinés à transformer l'agriculture.
J'en viens à votre deuxième question, la question institutionnelle. Au-delà de l'OFB, il faudrait évoquer l'ensemble des acteurs existants. À l'échelle nationale, quatre ministères sont impliqués : ceux de la recherche et de la formation, de l'agriculture, de la transition écologique et de la santé, qui sont les plus engagés à l'échelle nationale. On retrouve des représentants de ces ministères à l'échelle régionale, avec une séparation des fonctions, et donc un problème de pilotage régional, comme cela a été dit tout à l'heure. Nous recommandons, pour notre part, que ce soit la Draaf qui soit chargée de la coordination de l'ensemble du plan à l'échelle régionale, sous l'autorité du préfet, qui n'assure aujourd'hui qu'une sorte de coordination et n'est nullement en situation de responsabilité sur l'ensemble du plan.
Nous pensons aussi qu'il faut associer le niveau départemental à cette démarche, avec toutefois cette difficulté qu'il n'existe plus aujourd'hui de directions départementales de l'agriculture ou de l'alimentation, mais des directions départementales des territoires, interministérielles, qui possèdent un service d'économie agricole, lequel s'est du reste partiellement vidé car une partie des activités que menaient les départements ont été transférées aux régions au titre de la nouvelle PAC. La capacité de ces directions départementales à accompagner la transition agroécologique, dont les produits phytosanitaires ne sont, somme toute, qu'un seul élément, doit peut-être être renforcée. C'est là l'un des points sur lesquels le ministère a travaillé, y compris en aval de notre rapport, et qui mérite véritablement attention.
De nombreux autres services de l'État sont également concernés, notamment dans le domaine de la surveillance sanitaire, assurée par les Draaf et à l'échelle départementale. Je ne vais pas vous brosser un tableau exhaustif, mais les acteurs sont multiples. Ceux-ci ne partagent pas forcément de vision collective et peuvent se retrouver en difficulté. L'agriculteur peut avoir le sentiment, sur ce sujet-là comme sur d'autres, qu'il se trouve au centre d'un système très complexe dans lequel les acteurs ne se parlent pas beaucoup et où un grand effort de pédagogie doit être mené. Nous sommes tous conscients que l'accompagnement de l'agriculteur est crucial ; dans ce domaine, l'État dispose de marges de progrès réelles.
Quels sont les acteurs qui peuvent accompagner les agriculteurs ? Une ancienne proposition recommandait de créer un conseil stratégique sur le phytosanitaire : chaque agriculteur aurait été soumis tous les cinq ans à l'obligation de faire travailler un prestataire le conseillant sur l'utilisation des produits phytosanitaires. Dans notre rapport, rédigé il y a deux ans et demi, nous privilégions l'installation d'un conseil stratégique qui ne soit pas circonscrit au phytosanitaire. À l'échelle d'une exploitation, les produits phytosanitaires ne peuvent être que l'une des solutions d'une palette d'actions plus large. La réduction de l'utilisation de ces produits ne dépend pas uniquement de la sphère phytosanitaire, voilà pourquoi il nous a semblé indispensable que le conseil stratégique puisse se pencher sur la totalité de l'activité de l'exploitation et pas uniquement sur le volet phytosanitaire. Les acteurs du conseil devront s'organiser, car leur mission dépassera celle de l'aide à la vente de semences ou de produits phytosanitaires. Ce travail nécessaire d'adaptation est en cours.