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Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du mardi 26 septembre 2023 à 21h00
Commission d'enquête sur la structuration, le financement, les moyens et les modalités d'action des groupuscules auteurs de violences à l'occasion des manifestations et rassemblements intervenus entre le 16 mars et le 3 mai 2023, ainsi que sur le déroulement de ces manifestations et rassemblements

Bernard Cazeneuve, ancien Premier ministre et ancien ministre de l'intérieur :

Je pense que les opérations de maintien de l'ordre aujourd'hui s'effectuent dans un contexte différent de celui que j'ai connu. Cela tient au fait que la menace terroriste n'est pas au niveau qui était le sien à l'époque, que les effectifs ont été rehaussés, que des moyens supplémentaires sont donnés à la police depuis de nombreuses années et que la réforme du renseignement permet de prendre des décisions pertinentes et opportunes en amont des événements susceptibles de troubler gravement l'ordre public. Ces nouveaux paramètres, qui résultent de la volonté politique de donner aux forces de sécurité intérieure les moyens d'accomplir leur mission convenablement, diffèrent de ce que j'ai pu connaître à une époque où nous étions encore confrontés aux conséquences de la révision générale des politiques publiques, à une menace terroriste élevée et où les forces de sécurité étaient soumises à une pression très grande.

Cela signifie-t-il que la violence qu'exercent certains groupes extrémistes à l'occasion des manifestations a diminué ? Je ne le pense pas. Elle a plutôt augmenté. Si je m'exprime avec mesure sur l'action de mes successeurs, c'est parce que je considère que cette tâche de maîtrise de l'ordre public, dans un contexte de violence accrue, est difficile. Le rôle d'un responsable politique n'est pas de compliquer la tâche de ceux qui agissent.

Il peut y avoir des fautes, bien entendu, dans la police. Il peut y avoir des policiers qui manquent à leurs obligations déontologiques. Il peut y avoir des policiers qui tiennent des propos discriminatoires et racistes. C'est inacceptable. Il faut, à ce moment-là, des sanctions immédiates, que les inspections dont c'est le rôle et les responsables hiérarchiques dont c'est l'honneur prennent des dispositions pour que ces manquements soient condamnés et réprimés. D'ailleurs, ils le sont la plupart du temps. Mais le fait qu'il y ait des individus qui manquent à leurs obligations et qui, pour cela, doivent être sanctionnés ne signifie en aucun cas qu'il y a une consubstantialité de la violence à la police. Cela ne signifie pas que la police est raciste par nature. Cela signifie encore moins qu'on lui donne des ordres qui l'autoriseraient à se comporter de la sorte.

Laisser accroire cela, c'est organiser délibérément la suspicion, la défiance et, potentiellement, le ressentiment et la violence d'une partie de la société à l'égard des forces de l'ordre. Tout ce que nous devons faire, en ayant un haut niveau d'exigence à l'égard des forces de l'ordre, notamment déontologique, en étant intraitables sur cette question, c'est apporter la démonstration que la promesse républicaine, y compris lorsque cela concerne les forces de l'ordre, est intacte et que ceux qui portent la responsabilité politique entendent créer les conditions pour que cette promesse soit inaltérable. C'est cela que je crois être la responsabilité d'un républicain face aux difficultés auxquelles nous sommes confrontés parfois et qui conduisent une violence extrême à s'exprimer sans limite.

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