Les arguments avancés à l'instant par M. le rapporteur et par M. le ministre sont intéressants parce que nous les avons déjà entendus en commission. Malheureusement pour vous, nous avons eu le temps, depuis, de les étudier.
Vous nous dites que la notion d'emploi de qualité n'existe pas en droit et qu'aucune définition n'a été établie. Or, depuis 2001 – il y a donc vingt-deux ans, ce qui représente une période assez longue –, il existe une définition élaborée par la Commission européenne lors du sommet de Laeken, à une époque où l'Union européenne était pilotée par des sociaux-démocrates plutôt mous, dont on ne peut pas dire qu'ils fassent partie de notre camp social.
Cette définition identifie, pour caractériser un emploi de qualité, dix dimensions, tout comme celle publiée en 2014 dans les « Perspectives de l'emploi » par l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économiques. L'une comme l'autre s'appuient notamment sur l'étude d'Andrew E. Clark de 1998, la première à donner une définition à la fois objective et subjective de la qualité de l'emploi.
Il existe bel et bien depuis plusieurs décennies différentes définitions – concurrentes, discutables, divergentes ou non – de la qualité de l'emploi. Vous ne pouvez donc pas dire que vous n'êtes pas d'accord avec cette notion sous prétexte qu'elle n'existe pas. En revanche, vous pouvez parfaitement dire que vous vous y opposez parce qu'elle vous intéresse moins ou que vous jugez cette question moins importante que le fait de créer un grand nombre d'emplois, parfois inutiles et très souvent précaires.
Plutôt que de parler d'« emploi de qualité », il est aussi possible de parler d'« emploi convenable », expression que l'on retrouve dans des conventions collectives ou des accords nationaux interprofessionnels. Si le problème vous intéressait, vous pourriez donc l'évoquer en utilisant ces mots. Vous pourriez également vous référer à la définition donnée par les IRT, les instituts régionaux du travail.
En une minute, je vous ai donc proposé une poignée d'options qui vous permettraient d'aborder la question des emplois de qualité si vous vouliez faire preuve de bonne volonté. Or toutes ces définitions, qui existent, ne vous intéressent pas. Par ailleurs, elles entrent en contradiction avec la totalité de votre projet puisqu'elles visent à corriger l'évolution actuelle du marché de l'emploi, marquée par la précarité, la paupérisation et la réduction de la durée des emplois.