Il me revient à présent de vous présenter les articles des titres III à V.
Les articles du titre III rassemblent des dispositions qui tendent à favoriser l'accès à l'emploi et le maintien en emploi des personnes en situation de handicap. Elles s'inscrivent dans le prolongement des réformes conduites sous la précédente législature, de la refonte du régime de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) au programme Cap vers l'entreprise inclusive 2018-2022, du rapprochement des réseaux de Pôle emploi et de Cap emploi au plan de transformation des Esat – entre autres. Ces réformes ont eu des effets positifs, puisque le taux de chômage des personnes en situation de handicap est passé de 19 à 13 % entre 2017 et 2022 et que le taux d'emploi direct des bénéficiaires de l'OETH évolue positivement depuis l'entrée en vigueur de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
Ces résultats sont encourageants, mais insuffisants, tant les marges de progrès demeurent importantes. Il y a donc lieu que le Parlement légifère pour améliorer la situation de ce public, dans le respect des orientations dégagées par la mission de préfiguration de France Travail et des engagements formulés par la Conférence nationale du handicap. Avec ce texte, la majorité présidentielle s'y emploie.
L'article 8 étend à l'ensemble des bénéficiaires de l'OETH l'application des dispositifs ouverts aux seuls travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées : ils pourront par exemple bénéficier du dispositif d'emploi accompagné, dont la gestion est transférée à l'État, ou être recrutés par une entreprise adaptée. Il supprime le principe de l'orientation de ces travailleurs en milieu ordinaire, de sorte qu'elle devienne l'orientation de droit commun, ouverte à tous, sans validation préalable, afin de faciliter leur accès au marché du travail. Il pérennise les dispositifs expérimentaux relatifs au CDD « tremplin » et aux entreprises adaptées de travail temporaire, qui obtiennent de bons résultats, ce dont les acteurs du secteur se sont unanimement félicités.
L'article 8 bis A prévoit le recensement dans un système d'information national des aménagements ayant bénéficié à chaque personne en situation de handicap dans le cadre de sa scolarité, d'une formation ou d'un emploi. Traduction législative d'une annonce faite lors de la Conférence nationale du handicap, ce nouveau service, baptisé « sac à dos numérique », devra permettre la mise en œuvre d'aménagements plus fluides et plus rapides à toutes les étapes de la carrière.
L'article 8 bis B inscrit dans la loi la règle selon laquelle la portabilité des équipements contribuant à l'adaptation du poste de travail des travailleurs handicapés pourra être prévue par convention entre deux entreprises à l'occasion d'un changement d'employeur. Le risque d'une rupture dans les parcours professionnels sera en conséquence mieux prévenu.
L'article 8 bis, introduit par la commission des affaires sociales du Sénat, permet la mise à disposition d'un salarié temporaire auprès d'une entreprise utilisatrice, au motif qu'il bénéficie de l'OETH. Ce faisant, il confère un caractère pérenne au dispositif expérimental créé par la loi du 5 septembre 2018.
L'article 9 traduit lui aussi plusieurs annonces faites lors de la Conférence nationale du handicap. Il confie au service public de l'emploi le soin d'accompagner tous les demandeurs d'emploi, y compris ceux en situation de handicap, de faire converger les droits individuels et collectifs des travailleurs accueillis en Esat vers ceux que le code du travail garantit aux salariés et, enfin, de sécuriser les parcours professionnels de ces travailleurs.
Le Sénat a apporté quelques modifications aux articles du titre III qui, pour l'essentiel, ne soulèvent pas de difficulté. Je présenterai toutefois un amendement pour supprimer le dispositif ouvrant la voie à une modulation à la baisse du montant de la contribution versée par l'employeur pour s'acquitter de l'OETH, qui résulterait de l'effort consenti en matière de maintien dans l'emploi ou de recrutement direct des bénéficiaires de l'OETH, notamment ceux qui sont lourdement handicapés.
L'article 10, unique article du titre IV, modifie l'architecture de la gouvernance de la politique d'accueil du jeune enfant, selon une double approche. Premièrement, il clarifie le rôle et les missions des acteurs au plan national et local. Deuxièmement, il instaure de nouveaux leviers d'action et rénove les leviers existants au profit de ces acteurs. Les mesures qu'il contient s'inscrivent dans la perspective de la création du service public de la petite enfance, qui suppose d'autres évolutions, notamment l'augmentation du nombre de places en crèche. Chacun sait que le Gouvernement a fait des annonces dans ce domaine. Cet article a toute sa place dans le projet de loi : l'insuffisance quantitative de l'offre d'accueil d'enfants de moins de 3 ans et, plus généralement, l'inadaptation de cette offre aux besoins des familles à l'échelle du pays empêche de nombreux parents d'accéder au marché du travail ou de poursuivre leur activité – un phénomène qui pénalise très majoritairement les femmes. Il est donc impératif de lever ce frein connexe à l'emploi.
L'article fait des communes, qui interviennent déjà largement dans le champ de la petite enfance, les autorités organisatrices de la politique d'accueil du jeune enfant, tout en ajustant le périmètre de leurs obligations, en fonction du nombre de leurs habitants. Il crée un mécanisme de régulation de l'offre d'accueil au plan local. Il améliore la prise en compte des besoins du secteur dans les politiques de formation, afin de lutter contre la pénurie des professionnels. Il facilite l'implantation des structures d'accueil sur le territoire.
Vous le savez, l'article 10 a été substantiellement modifié par les sénateurs. Ces derniers ont en effet supprimé les dispositions relatives à l'établissement d'une stratégie nationale de l'accueil du jeune enfant, ainsi que les dispositions relatives au contrôle du respect par les communes de leurs nouvelles obligations. Ils ont aussi décidé que l'élaboration du schéma pluriannuel de maintien et de développement de l'offre d'accueil du jeune enfant ne serait imposée qu'aux communes de plus de 10 000 habitants, ce qui réduit considérablement la portée du dispositif. Ils ont repoussé d'un an l'entrée en vigueur des dispositions touchant à la mise en œuvre des nouvelles compétences reconnues aux communes. Ils ont, enfin, autorisé le principe du transfert aux intercommunalités de tout ou partie des compétences attachées à la qualité d'autorité organisatrice de l'accueil du jeune enfant. Ils ont préféré cette solution à celle du transfert en bloc, initialement retenue.
Avec la majorité, je vous proposerai de revenir sur certaines de ces évolutions et d'apporter au texte quelques modifications complémentaires, pour en faire le support d'une réforme cohérente, utile et ambitieuse de la gouvernance de la politique du jeune enfant.