Intervention de Laure Darcos

Réunion du jeudi 29 juin 2023 à 9h05
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Laure Darcos, sénatrice, rapporteure :

Comme pour le reste de la recherche française en biologie-santé, on observe depuis quelques années un déclassement de la recherche française en oncologie, sous-financée par rapport aux meilleurs standards internationaux. Pour les essais cliniques, malgré de récentes améliorations, l'attractivité française continue de souffrir de délais de mise en place perçus comme trop longs. La France continue cependant de participer à un nombre important d'études interventionnelles en oncologie et se place au 3e rang mondial sur ce critère.

Concernant l'accessibilité aux médicaments, le dispositif d'accès précoce permet aux patients français de bénéficier de manière anticipée – c'est-à-dire avant même leur mise sur le marché – de traitements considérés comme particulièrement innovants. Toutefois, l'Observatoire sociétal des cancers fait valoir qu'il existe d'importantes inégalités dans l'accès aux traitements, dont les plus innovants, accentuant de ce fait les inégalités de santé sociales et géographiques existantes. On peut également souligner des difficultés d'accès à certains tests diagnostiques, qui empêchent l'utilisation de médicaments personnalisés, et les pénuries qui affectent certains médicaments essentiels.

Plusieurs des personnes auditionnées ont estimé que la doctrine de la Haute Autorité de santé (HAS) à l'égard de certains nouveaux traitements était inadaptée. S'il est évidemment indispensable de conserver une exigence de qualité quant à l'examen des nouvelles thérapies, les modalités d'évaluation doivent pouvoir prendre en compte les spécificités liées à ces nouveaux traitements. Quelques témoignages aberrants ont montré le décalage par rapport à la temporalité de la HAS.

Enfin, le prix de ces traitements est souvent bien supérieur à celui des traitements actuels, en raison des efforts de R&D nécessaires, de coûts de production parfois élevés et de marchés plus restreints dans le cas de traitements personnalisés. À l'avenir, cette tendance est susceptible d'avoir un impact sur l'équilibre financier de notre système de protection sociale et d'interroger l'équité d'accès aux meilleurs traitements disponibles.

J'en viens donc à nos neuf recommandations :

- soutenir financièrement le développement de traitements innovants en France, de la recherche fondamentale au développement industriel, et encourager la mise en place de partenariats public-privé ;

- renforcer le rôle de programmation et de coordination de l'Institut national du cancer (INCa) pour la recherche en oncologie et s'en servir de modèle pour simplifier l'organisation de la recherche publique en biologie-santé ;

- développer la disponibilité des tests diagnostiques, indispensables pour la médecine de précision, et permettre leur remboursement ;

- accroître le nombre de plateformes de génomique, en développant la relation public-privé ;

- permettre une mise en place plus rapide des essais cliniques, de façon à augmenter l'attractivité française pour la recherche, en offrant notamment de nouveaux moyens aux Comités de protection des personnes (CPP) ;

- inviter la Haute Autorité de santé (HAS) à adapter ses modèles d'évaluation pour les traitements innovants ;

- accroître le nombre de conseillers en génétique, de bio-informaticiens et d'attachés de recherche clinique en milieu hospitalier en faisant appel à des acteurs d'origine scientifique ;

- réformer l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) pour permettre une gestion pluriannuelle des dépenses de médicaments innovants ;

- associer autant que possible aux décisions les chercheurs, associations de patients, médecins et industriels.

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