J'ai peu d'éléments sur les fumiers mais j'ai participé à une étude sur les boues de stations d'épuration issues de milieux urbains : nous y retrouvions des résidus de pesticides. Certains pesticides ont aussi des usages biocides, ce qui peut contribuer à l'explication, mais on peut effectivement considérer que des produits résiduels organiques apportent au sol des résidus de contaminants, notamment de pesticides.
Les plantes métabolisent les pesticides, mais de façon différente. Dans cette même étude, on a trouvé dans des radis des produits de transformation relativement toxiques. Il y a donc bien des transferts dans les réseaux trophiques, de résidus chimiques mais aussi de matériel biologique. On retrouve par exemple les mêmes gènes de résistance à des fongicides dans le sol, dans des bulbes de tulipes et dans les poumons de certains patients immunodéprimés. Mais les mécanismes scientifiques derrière ces phénomènes sont mal connus.
Je vous ai indiqué que les micro-organismes dégradaient la matière organique, et qu'il existait une très grande redondance fonctionnelle qui empêchait de dégager les effets nets de l'exposition des micro-organismes aux pesticides. Mais si l'on prend le cycle de l'azote, les communautés sont beaucoup plus réduites. Nous nous sommes rendu compte que les communautés microbiennes responsables du cycle de l'azote dans les sols pouvaient être impactées par les pesticides et ainsi, qu'elles pouvaient être des indicateurs intéressants à prendre en compte pour des études de risques.
On parle beaucoup de l'exposome. Le transfert du concept d'exposome en écotoxicologie en est encore à ses balbutiements, principalement en écotoxicologie humaine. Mais cela semble très intéressant en effet. Enfin, nous n'avons plus de formation spécifiquement dédiée à la science du sol, alors que nous avions avant un diplôme d'études approfondies (DE) de sciences du sol, ce qui fait que nous n'avons plus de vrais pédologues. Aujourd'hui, la science du sol semble un peu diluée dans les enseignements autour des sciences de l'environnement. Cependant, nous avons encore de très grands spécialistes.