Nous vous remercions de nous recevoir pour évoquer ce sujet majeur. Les gendarmes sont régulièrement confrontés aux groupuscules violents lors des manifestations ou dans l'exercice quotidien de leurs fonctions. Cette commission d'enquête n'étant pas à huis clos, nous n'entrerons pas dans les détails techniques de nos missions. Mais nous essayerons de nous focaliser sur le ressenti des personnels. Nous pourrons compléter notre propos par écrit.
Comme tous les gendarmes, nous sommes attachés à la liberté de manifester et à la protection de ce droit. Pour nous, les réponses pénales à l'égard des casseurs doivent être réelles et à la hauteur. Nous constatons que ces groupuscules sont de plus en plus violents, structurés et coordonnés. Ils disposent de capacités de communication vers la France et l'étranger.
Les groupuscules violents menacent la liberté à manifester de ceux qui exercent légitimement ce droit. En manifestation, l'initiative est trop laissée à l'adversaire, dorénavant. Cet adversaire opère de véritables manœuvres tactiques au moment où la gendarmerie doit agir sans certaines armes intermédiaires dont nous disposions auparavant, mais également sans véhicules, notamment pour le maintien de l'ordre rural. Notre capacité opérationnelle s'en trouve affectée.
Aussi, nous pensons que les réflexions doivent se poursuivre pour développer de nouveaux usages. Nous pouvons parler des drones ou des quads, comme vous l'avez évoqué à propos de Sainte-Soline. Nous devons aussi travailler sur les véhicules multi missions que sont les Centaure, qui seront utiles. Il est également nécessaire de retrouver la mobilité des pelotons d'intervention pour réagir rapidement à la violence et y mettre fin par des interpellations plus nombreuses.
Malheureusement, les pelotons d'intervention sont trop souvent utilisés comme des pelotons de marche, principalement par manque d'effectifs. Des décisions ont été prises pour améliorer la capacité opérationnelle de la gendarmerie mobile. Cependant, les effectifs ne sont toujours pas à la hauteur des enjeux. Les sept escadrons à venir participeront à une meilleure réactivité, néanmoins déjà mise à mal par le nombre croissant de sollicitations auxquelles nous sommes confrontés depuis quelques années.
La gendarmerie a l'impression d'être en crise permanente et de lutter contre une crise permanente. Depuis de longs mois, l'emploi se situe à un niveau exceptionnel. Il paraît nécessaire de poursuivre un accroissement des effectifs pour revenir au niveau connu en 2006. Les escadrons de gendarmerie mobile comptaient alors de l'ordre de 15 000 personnels. Après la création des sept escadrons, qui est en cours, ils seront d'environ 13 800. Pour revenir au chiffre de 2006, il manquera encore 1 200 personnels. Or, le maintien de l'ordre est plus difficile qu'alors et les besoins outre-mer plus importants, comme nous le voyons à Mayotte. En outre, nous exerçons des missions que nous n'assurions pas à l'époque, telle la lutte contre l'immigration irrégulière. Nous assumons aussi des missions qui nous avaient été retirées entre-temps, comme les centres de rétention administrative. Par conséquent, les moyens annoncés, s'ils sont appréciables et appréciés, demeurent insuffisants.