Pour beaucoup de supporters, les insultes que vous avez mentionnées font effectivement partie du « folklore » footballistique. Pendant des années, les propos homophobes et discriminatoires ont été monnaie courante et faisaient rire tout un stade. J'ai vu tout un virage sauter à Marseille en traitant les Parisiens de « pédés », y compris des enfants et des femmes.
Si les clubs, qui doivent faire respecter la loi, dialoguaient avec les supporters, en rappelant notamment l'existence de sanctions, parfois lourdes, la situation pourrait peut-être s'améliorer. Mais je ne crois pas qu'il existe un racisme organisé. Certains le font par conviction, sans nécessairement déployer une organisation particulière. En revanche, certains assument leurs idées d'extrême-droite.
Dans le cadre de notre documentaire, nous avons organisé une rencontre entre M. Olivier Dacourt et un supporter ouvertement fasciste, qui arborait notamment un tatouage de Mussolini. Il était supporter du club de la Lazio de Rome, le grand rival de l'AS Rome, club dans lequel Olivier avait joué. Ce supporter se justifiait devant lui qu'il n'aimait pas les noirs et revendiquait ses insultes dans le stade. La situation était totalement absurde : quand l'interview s'est achevée, ce supporter a voulu prendre des photos avec Olivier et appeler en vidéo d'autres supporters de la Lazio. Ces supporters étaient contents de le voir. Cette situation était assez déstabilisante.
Je ne sais pas comment il est possible d'agir dans ce domaine. Je ne pense pas qu'il faille lutter contre les associations de supporters. Il doit y avoir de l'ambiance dans les stades et les supporters doivent avoir voix au chapitre. Mais on minimise l'insulte homophobe ou raciste, d'une part en raison de l'absence de sanctions et d'autre part de dialogue, ni d'éducation. Simultanément, il ne faut pas hésiter à écarter les meneurs tendancieux, que les clubs connaissent. Selon moi, le vrai danger est la rupture entre les clubs et leurs supporters.