Nous suivions attentivement la société Wagner bien avant le 24 février 2022, en raison notamment de son engagement en Afrique dès 2017, en commençant par la République centrafricaine (RCA).
Wagner hier n'est pas Wagner aujourd'hui. La tentative de coup de force de Prigojine est une forme de rupture. Wagner hier était utilisée comme force supplétive des forces russes engagées dans la guerre en Ukraine. Un secteur du front lui a été confié. Ses hommes s'y sont battus, singulièrement à Bakhmout.
Leur contribution concrète n'a pas tant été la saisie, d'une importance tactique assez limitée, de la ville de Bakhmout, que leur participation significative à l'usure de l'outil de défense ukrainien. Lorsque ce secteur du front leur a été confié, ils coordonnaient leur action avec les forces armées russes. Wagner était un élément constitutif du dispositif militaire russe et recrutait ses mercenaires sur les sites habituels, ainsi qu'en prison, dans des volumes significatifs, les anciens prisonniers ayant subi de très lourdes pertes dans le secteur de Bakhmout.
Bakhmout a été saisie peu de temps avant le coup de force, au tout début du mois de juin. Le personnel de Wagner a été rapidement relevé par des forces conventionnelles sur ce secteur du front et désengagé de la région de Louhansk.
Ainsi, lors de la tentative de coup de force, les mercenaires de Wagner n'étaient plus engagés en opération. C'est l'une des raisons pour lesquelles cette crise n'a pas eu d'effet déstructurant sur la cohérence du dispositif russe. Le personnel de Wagner était, du moins en théorie, pleinement intégré au commandement russe jusqu'à la saisie de Bakhmout, même s'ils étaient parfois un peu difficiles à commander.
Depuis le coup de force de la fin du mois de juin, Wagner se réorganise dans la partie orientale de l'Ukraine et négocie avec Vladimir Poutine. L'issue de ces négociations est difficile à prédire.
Ce qui est sûr, c'est que le Wagner d'hier, qui a produit des effets importants en matière d'usure de la capacité opérationnelle ukrainienne, n'est pas près de se régénérer à l'identique demain. On n'imagine pas Wagner représenter une même capacité opérationnelle d'appoint tout en jouissant d'une certaine autonomie et redevenir un élément constitutif essentiel des forces russes dans les semaines ou les mois à venir.