La souveraineté alimentaire de notre continent dépend largement de notre capacité d'approvisionnement en engrais pour nos cultures. Or, avec la guerre russo-ukrainienne, plus de 30 % des engrais azotés, 65 % des engrais phosphatés et 90 % des engrais potassiques utilisés en Europe sont importés – pour près de la moitié de Russie, d'Ukraine et de Biélorussie. La production d'engrais azotés sur notre continent dépend aussi de notre approvisionnement en gaz naturel. On voit donc se conjuguer les dépendances énergétiques et les dépendances aux engrais. À l'image du plan REPowerEU lancé après le début de la guerre en Ukraine pour renforcer notre indépendance énergétique, peut-être devrait-on lancer un plan REFertilizeEU.
Quel est l'état des lieux des solutions envisagées pour renforcer l'autosuffisance de l'Union européenne en production d'engrais ? Peut-on compter sur un déploiement à plus large échelle d'une production d'azote et d'ammoniaque à partir d'hydrogène ?
M. André Chassaigne (GDR-NUPES). Dans le cadre de la mission d'information visant à dresser un état des lieux des plans stratégiques nationaux en matière agricole, que je mène avec Nicole Le Peih, plusieurs questions nous sont régulièrement posées.
La première concerne le passage d'un paiement à l'hectare à un paiement à l'actif. En cherchant à éviter un effet de vases communicants et à ne pas déshabiller Pierre pour habiller Paul, on aboutit à une forme de statu quo. Ne faudrait-il pas revenir sur ce point lors de la révision, qui peut être annuelle, du plan stratégique national ?
Ma deuxième question concerne l'organisation des écorégimes. Tels qu'ils ont été retenus dans le PSN français, ils apparaissent insuffisamment incitatifs puisque 90 % des agriculteurs ont accès au niveau de base sans avoir à changer leurs pratiques agricoles. Ne faudrait-il pas un accompagnement plus poussé pour passer au niveau supérieur ?
Enfin, quel intérêt climatique, environnemental et alimentaire y a-t-il à intégrer l'élevage dans les accords de libre-échange, sinon des arrangements avec d'autres secteurs ? J'ajoute que l'élevage est essentiel pour boucler le cycle de la fertilité du sol et limiter la consommation d'intrants, notamment d'engrais azotés. Le réduire aura ainsi des conséquences négatives pour l'environnement.