Depuis sa création, la PAC a changé d'objet. Au départ, elle avait une visée quantitative, ce qui a justifié des politiques d'exploitation intensive ayant causé les dégâts que nous connaissons. Elle est désormais plus qualitative. Si la nouvelle PAC doit fournir aux citoyens de l'Union européenne une alimentation sûre à un prix abordable, assurer un niveau de vie équitable aux agriculteurs et préserver les ressources naturelles en respectant mieux l'environnement, elle peine à atteindre ces objectifs compte tenu de l'inflation des prix alimentaires, de la concurrence déloyale liée aux accords de libre-échange et des difficultés à faire appliquer les clauses miroirs dans certaines filières. Nous avions déjà connu des problèmes avec les graines de lin d'Australie ou la filière pommes de terre au Canada. Les effets se font sentir dans chaque pays, au travers des suicides d'agriculteurs, du surendettement, du manque de renouvellement des générations, de la pollution des sols et du manque de contrôle aux importations.
Il nous faut une PAC au service de la souveraineté alimentaire – une souveraineté par définition nationale avant d'être européenne, même si l'Europe est en train de s'arroger ce droit. Mais les engagements tendent vers un système de sous-production, si nous respectons les délais prévus par la stratégie « de la ferme à la table ». J'ai débattu de ces dossiers durant trois ans à la commission de l'agriculture du Parlement européen, où il a fallu batailler pour éviter la sous-production.
Le respect des engagements environnementaux et la transformation de notre modèle de production en un modèle plus localiste, dont nous avons été les premiers à parler dès les années 1980, doivent servir à assurer l'autonomie alimentaire de chaque État membre et de l'Europe au lieu d'accentuer le niveau de pauvreté des agriculteurs.
Je souhaite aussi évoquer le renouvellement des générations. Le nombre d'exploitations diminue. En 2020, on en dénombrait 400 000, soit 800 000 de moins qu'en 1980. Chaque année, environ 20 000 chefs d'exploitation cessent leur activité tandis que seuls 14 000 s'installent. Cette tendance fait l'objet d'une attention croissante, alors que 43 % des exploitants ont plus de 55 ans et partiront à la retraite dans les dix prochaines années. Comment envisagez-vous l'avenir démographique de la profession ? Prévoyez-vous de mettre en place des avantages fiscaux, que ce soit dans le cadre de la transmission ou pour les acquéreurs et les jeunes accédant à la profession ?