J'ai souhaité que la santé soit un axe à part entière, fondamental, du plan Toutes et tous égaux pour deux raisons : la santé des femmes présente des spécificités qui ne se limitent pas à une approche gynécologique et nécessite une approche globale ; elle revêt un enjeu d'égalité professionnelle tout au long de la carrière.
Je ne reviens pas sur les principales mesures de ce plan que vous avez rappelées. Il a été lancé le 8 mars et j'ai tenu hier un premier comité de suivi avec l'ensemble des ministères et administrations concernés. Le travail est lancé. Ainsi, sur la gratuité des protections périodiques réutilisables jusqu'à 25 ans, qu'il s'agisse de culottes ou de coupes menstruelles, le ministère de la santé travaille à identifier des produits à la fois sûrs, hygiéniques et de qualité.
En ce qui concerne le plan de lutte contre l'endométriose, 10 millions d'euros, je l'ai dit, seront consacrés à la recherche.
S'agissant de ce qui n'est pas prévu dans ce plan, je suis ouverte à vos suggestions mais, dès la prochaine rentrée, nous traiterons de deux sujets. Le premier concerne les règles, dont on ne parlait pas il y a quelques années encore, pas plus d'ailleurs que de précarité menstruelle. J'avoue avoir vraiment compris l'ampleur de cet enjeu à mon arrivée à ce ministère. Auparavant, je n'avais pas conscience qu'autant de jeunes femmes renonçaient à acheter des protections périodiques pour des raisons de coût. La mesure que nous avons prise me paraît donc une avancée en matière de santé publique.
Ayant levé ce tabou des règles, nous pourrons certainement aller plus loin, en nous attachant à la notion de règles incapacitantes et à leurs conséquences dans le cadre du travail et en termes de congés. Je n'irai pas plus loin pour l'instant, je précisais seulement que nous sommes tout à fait disposées, puisque Mme la Première ministre l'a également évoqué, à travailler sur ce point.
Un autre sujet n'a pas été vraiment abordé. Après le tabou pesant sur la fausse couche et sur les règles, il en reste un à lever : celui de la ménopause. Dans nos sociétés, les femmes sont souvent invisibilisées ; après 50 ans, elles le sont encore davantage. Cette question de santé mériterait d'être prise en considération dans le milieu du travail et, à l'évidence, nous devons y travailler ensemble.
Nous protégeons et soutenons le sport féminin. Ma collègue Amélie Oudéa-Castéra est une alliée. Nous créons le label Terrain d'égalité. Les grands événements sportifs qui le détiendront devront intégrer certains paramètres en matière de parité, de lutte contre les violences sexuelles et sexistes, et respecter un cahier des charges. La Coupe du monde de rugby me semble bien placée pour l'obtenir.
La question des compétiteurs ou compétitrices trans est un sujet que nous avons identifié. Un groupe de travail comprenant des chercheurs a été constitué pour réfléchir de manière éclairée à la façon de prendre en compte cette question, dont la réponse n'est pas si évidente.
Sur les 10 millions consacrés aux centres LGBT+, 3 millions avaient été engagés par la Première ministre en août 2022 pour renforcer l'existant et en créer de nouveaux. Il restera donc 7 millions à employer d'ici à 2026. Nous visons la création d'une dizaine de nouveaux centres, de sorte que toutes les régions en possèdent deux, sans oublier l'outre-mer puisque, à ce jour, seule La Réunion est dotée.
En ce qui concerne la formation des forces de l'ordre, lors d'une réunion avec les associations concernées, le ministre de l'intérieur avait réaffirmé sa volonté d'avoir des référents dans chaque commissariat et gendarmerie. D'après les dernières informations dont je dispose, ils seraient quasiment tous désignés ou sur le point de l'être.
L'interdiction de stade est prévue comme peine complémentaire de principe car, vous le savez, nous ne pouvons pas imposer de peine complémentaire automatique – ce serait inconstitutionnel. Mais une peine complémentaire de principe, sauf motivation expresse contraire du juge, me paraît un signal fort de l'État, qui considère que la haine n'a pas sa place dans les stades. Si d'autres veulent prendre des responsabilités à titre individuel, c'est très bien, mais il importe que l'État dise clairement que la haine homophobe n'a pas sa place dans les stades, et qu'en conséquence, elle est sanctionnée. Les auteurs de cette haine n'y ont pas non plus leur place. C'est clair et net, et la sanction doit être systématique.
Les formulaires administratifs comporteront des doubles cases qui permettent d'inscrire deux pères, deux mères ou deux tuteurs, afin de ne pas stigmatiser les familles homoparentales. C'est une avancée importante également pour le respect de la dignité humaine, de toutes et tous, grands et petits, si je puis dire.
S'agissant du harcèlement scolaire, la lutte contre la LGBTphobie a été intégrée au programme Phare. Mme la Première ministre a lancé, vendredi dernier, un comité interministériel sur le harcèlement scolaire auquel j'ai participé. Nous pourrons vous répondre plus précisément lorsque le plan en cours d'élaboration sera finalisé. Ces travaux ont été lancés la semaine dernière, il est un peu tôt pour en parler. La lutte contre la haine anti-LGBT+ s'appuiera sur la sensibilisation de référents et de jeunes ambassadeurs volontaires, choisis pour être au plus près de leurs camarades et recueillir leur parole, ou encore sur la distribution, dans chaque inspection académique, d'une liste d'associations susceptibles d'intervenir sur ces thèmes dans les écoles.
Je ne peux m'empêcher d'avoir une pensée pour le bus Agir pour le cœur des femmes qui a été brûlé à Bobigny. J'y étais la veille, et cela m'a particulièrement touchée. Avec François Braun, nous avons pris l'engagement d'aider au renouvellement cet équipement.
Une campagne de prévention cardiovasculaire et gynécologique est prévue dans le plan Toutes et tous égaux. Quant à la notion d'aller-vers, trente vans ou bus itinérants seront déployés pour la détection des maladies cardiovasculaires et gynécologiques pour les femmes les plus isolées, notamment en zone rurale.
Le DES de gynécologie relève du ministère de la santé, mais cette préoccupation croise, bien évidemment, le sujet de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la santé et des droits des femmes. Je prends note d'aborder la question avec François Braun afin de vous répondre plus précisément.
La difficulté de prouver les violences conjugales psychologiques est un sujet important. De mon expérience passée en tant que présidente de cour d'assises ayant jugé de nombreux féminicides, je sais combien cette violence invisible peut détruire autant que la violence physique. J'ai même vu des féminicides être commis sans violence physique préalable mais après des mois, voire des années de violence psychologique. Il nous faut vraiment travailler sur ce sujet. Cela passe par la formation de tous les professionnels, en particulier celle des magistrats. Des magistrats formés et intégrés à des pôles spécialisés renforcent la justice. Si l'on ne sait pas ce qu'est ce phénomène d'emprise, si l'on ne comprend pas ce qu'est le psychotraumatisme, si l'on n'a pas conscience de l'effet dévastateur des violences au sein du couple sur les enfants, on laisse des femmes et des enfants en danger.
C'est aussi pour cela que je souhaiterais travailler sur la notion de contrôle coercitif. Cela permettrait d'avoir une définition légale de la violence invisible subie à travers un contrôle coercitif, qui explique bien qu'il s'agit d'un auteur qui place toute sa famille sous sa domination et y sème la terreur. Je ne m'étends pas sur le sujet car je serais trop longue tant il me tient à cœur, mais cette définition permettrait de mieux caractériser cette violence psychologique et d'agir en termes non seulement de répression, mais également de prévention. Les différents professionnels pourraient intervenir plus tôt. C'est déjà le cas ; je trouve que les interventions sont de plus en plus précoces, mais il est toujours possible de faire mieux. Cela permettrait également de sensibiliser la société et toutes les femmes pourraient se rendre compte que ce qu'elles vivent n'est pas normal. C'est un sujet qui me tient vraiment à cœur.
Le sort des sages-femmes, à l'image de celui des gynécologues, relève de la santé. Néanmoins, nous avons bien avancé, puisque l'axe santé du plan a aussi été travaillé en collaboration avec des sages-femmes. J'en rencontre régulièrement. Le plan prévoit une campagne de communication pour que les femmes soient bien informées sur le rôle des sages-femmes dans l'accompagnement et le suivi gynécologique régulier des femmes. La « loi Josso » permet également aux sages-femmes d'orienter leurs patientes vers MonParcoursPsy et, par suite de la « loi Gaillot » visant à renforcer le droit à l'avortement, les sages-femmes pourront, dès janvier 2024, pratiquer des IVG chirurgicales. J'ai souhaité mettre un coup d'accélérateur dans l'application de cette mesure.
Les dispositifs de prise en charge globale et complète des femmes victimes de violences – type maison des femmes, mais ce n'est pas le seul modèle – ont déjà fait leurs preuves, car la prise en charge rapide et pluridisciplinaire permet de ne pas morceler les femmes. Nous comptons cinquante-six structures, l'objectif est d'en avoir une par département d'ici à 2027.
Une mission d'intérêt général (MIG) du ministère de la santé, prévoit d'adosser ces structures à un établissement hospitalier. Elles ne seront pas nécessairement situées dans les locaux de l'hôpital, mais seront de son ressort administratif. Sur la période 2020-2022, 5 millions ont été consacrés à cette MIG, et 2,5 millions d'euros supplémentaires sont mobilisés en 2023, pour la création de nouvelles structures. Avec ma collègue Agnès Firmin Le Bodo, qui suit le dossier pour le ministère de la santé, nous avons réuni le réseau Maison des femmes, mais également nos grands réseaux habituels – CIDFF, Solidarité femmes et Planning familial – pour réfléchir à une manière de revoir le cahier des charges, parce qu'en fait, une partie du financement est assurée ainsi, mais des financements complémentaires peuvent venir des collectivités territoriales, voire du privé, comme c'est le cas pour la maison des femmes de Seine-Saint-Denis.
Nous avons également travaillé pour que l'aspect judiciaire soit présent dans ces structures. Il est important que les femmes prises en charge puissent aussi y déposer plainte. On sait que l'on perd souvent les victimes lorsqu'elles doivent aller déposer plainte au commissariat ou à la gendarmerie après avoir été examinées et prises en charge psychologiquement. C'est la raison pour laquelle nous avons signé – ministères de la santé, de la justice, de l'intérieur et le mien – une convention, juste après le 8 mars, avec le collectif Re#Start – donc, le réseau Maison des femmes – pour généraliser le dépôt de plainte dans ces structures.
Les personnes transgenres existent dans ce plan dont le titre est « Plan national de lutte contre la haine anti-LGBT+ ». Toutes les mesures protègent donc aussi les personnes trans. Il est vrai que notre approche universaliste ne distingue pas forcément mais, bien évidemment, ces personnes sont protégées. Dans le cadre de toutes les formations – car, comme je l'indiquais, il s'agit d'un plan de formation massif –la question LGBT+ sera abordée, donc forcément celle de la transidentité.
Je suis très heureuse que le Parlement ait adopté la proposition de loi Létard qui marque une belle avancée dans la prise en compte de ces violences et surtout dans l'accompagnement matériel d'extrême urgence des femmes victimes de violences.
L'expérimentation du pack nouveau départ dans le Val-d'Oise s'achève. Je l'avais lancée le 6 mars dernier. Un rapport très concret me sera remis. Je m'y suis moi-même rendue il y a une quinzaine de jours. C'était très encourageant puisque quatre-vingt-dix acteurs se sont mobilisés. Au-delà du dispositif en tant que tel, qui permettra un accompagnement matériel vers l'autonomie matérielle et financière des femmes victimes de violences, c'est une véritable synergie locale de prise en charge des femmes victimes de violences conjugales qui est en train de s'instaurer. À partir de septembre, d'autres territoires seront concernés dont certains ont été annoncés, comme les Bouches-du-Rhône, la Côte-d'Or et La Réunion – et deux autres que nous annoncerons à la rentrée, l'essentiel étant un déploiement général d'ici à 2025.