Puisque vous parlez des blessés psychiques, j'en profite pour dire à M. Bex que 2 600 d'entre eux sont identifiés aujourd'hui, et que nous devrions arriver rapidement à 3 500.
En effet, celles et ceux qui en souffrent doivent le reconnaître et le dire. Il s'agit de blessures bien réelles. Les soldats doivent pouvoir nous alerter dès les premiers signes. Les retours d'Opex sont à cet égard des moments clés, grâce aux sas de décompression. Les familles aussi doivent servir de relais. Nous devons les informer concernant des comportements difficiles à gérer, comme un mutisme qui dure plusieurs jours, et leur fournir des éléments d'alerte, le but étant de détecter le plus tôt possible une éventuelle blessure psychique.
Je me rends personnellement dans les maisons Athos et je rencontre des blessés. Cela me permet de comprendre très précisément quand et comment les blessures se déclenchent, pourquoi les soldats ne les ont pas signalées plus tôt. Très souvent, c'est qu'ils n'en avaient pas conscience eux-mêmes. Plus on parle de cette problématique, plus on la connaît, mieux on la détecte. Ainsi, je suis favorable à ce qu'on l'aborde dès la formation de nos soldats. Il s'agit de mieux prévenir, pour mieux guérir.
Il faut également prévoir des formations pour les psychologues et psychiatres civils, qui travailleront main dans la main avec les médecins du SSA à un module – un mooc, c'est-à-dire un cours en ligne – qui les aidera à mieux déceler ces blessures psychiques. Il n'est plus possible qu'un militaire qui sent que quelque chose ne va pas et qui décide, de lui-même, d'aller voir un psychologue s'entende répondre « Vous vous attendiez à quoi ? Vous êtes soldat ! »
Toutes les blessures doivent être soignées de la même manière, qu'elles soient physiques ou psychiques. Un général m'a confié un jour qu'il ne croyait pas aux blessures psychiques, jusqu'à la mort d'un de ses proches, soldat. C'est seulement alors qu'il a pris conscience que cela existait. Aujourd'hui, les états-majors nous aident pour que la blessure psychique soit reconnue et prise en charge rapidement. Il faut pour cela que les soldats en parlent librement. Forcément, cela va provoquer une augmentation du nombre de ces blessés. Mais c'est normal et c'est ce que nous voulons, pour pouvoir les soigner le plus vite possible.
En ce qui concerne l'employabilité des anciens combattants, qui ont besoin de se sentir utiles pour leur pays, deux reconversions sont possibles. Il y a, d'abord, les emplois réservés de la fonction publique. J'invite les conseils départementaux à profiter de la grande qualité des militaires pour affronter certains défis, comme la crise climatique. Nos soldats savent se déployer très rapidement, lorsqu'il y a des incendies notamment, car ils savent ce qu'aller au feu veut dire. Nous devons continuer à travailler en ce sens avec les collectivités territoriales.
Il y a ensuite le marché des emplois privés. Nous engageons un travail pour que les militaires s'y intègrent. Par exemple, les entreprises des grands opérateurs de réseau, qui se mobilisent pour faire disparaître les zones blanches, emploient beaucoup de câbleurs. Elles ne pensent pas spontanément aux militaires pour faire ce travail et nous essayons d'élaborer des partenariats avec elles, d'autant qu'elles sont nationales et présentes sur l'ensemble du territoire – ce qui permettrait aux soldats de se rapprocher de leur famille.
Enfin, je crois que les blessés attendent de nous beaucoup de reconnaissance, ce qui passe bien sûr par des commémorations, mais aussi par le vote des 413 milliards de la LPM.