La loi Kouchner de 2002 représente une avancée majeure pour l'indemnisation des victimes d'accidents médicaux. En consacrant l'indemnisation des accidents médicaux non fautifs les plus graves et en la confiant à l'Oniam, créé pour l'occasion, le législateur a fait du droit français un droit particulièrement protecteur pour les victimes.
Toutefois, en 2017, un rapport de la Cour des comptes pointait avec justesse les dérives dans la gestion de l'Oniam. Didier Migaud, alors président de cette juridiction, avait déclaré : « La victime a été trop souvent oubliée par l'institution pourtant chargée d'en protéger les intérêts. » Certains s'étaient alors prononcés pour une réforme profonde de l'office ; finalement, seul un changement de direction fut décidé. Quelques années plus tard, en 2021, c'est l'Igas qui identifia un certain nombre de problèmes au sein de l'Oniam, dénonçant notamment le très haut niveau de turnover, les difficultés de recrutement d'experts, l'obsolescence des systèmes d'information ou encore le besoin de modernisation des pratiques comptables.
À la lecture du dernier rapport d'activité de l'Oniam, on observe que les dépenses d'indemnisation ont progressé, que les délais moyens de traitement des dossiers se sont améliorés et que la rémunération des experts médicaux a été revalorisée. Mais de sérieux problèmes subsistent. S'agissant notamment de l'indemnisation des victimes de la Dépakine, un rapport du Sénat, adopté en septembre 2022, est édifiant : alors que les prévisions initiales évaluaient les dépenses à 77,7 millions d'euros par an, l'exécution annuelle du dispositif jusqu'en 2021 n'a jamais dépassé 16,8 millions d'euros. Sont en cause des demandes insensées adressées aux victimes, des dossiers de plusieurs centaines de pages à remplir, des documents médicaux et, parfois, des justificatifs de déplacement vieux de plusieurs dizaines d'années. Enfin, les délais de traitement des dossiers sont excessivement longs : trente-deux mois en cas d'acceptation, trente-quatre mois en cas de rejet. Quant aux barèmes d'indemnisation, ils sont inférieurs de 30 à 40 % à ceux des tribunaux civils. Pour ce qui est de l'indemnisation au titre d'une vaccination H1N1, les victimes sont en attente depuis plusieurs années. On peut légitimement se demander comment vont être abordées les demandes des victimes de la vaccination contre le covid-19.
En tant que futur président du conseil d'administration de l'Oniam, quelle est votre analyse de cette situation largement insatisfaisante ? Comment faire, selon vous, pour que de nombreuses victimes ne se sentent plus prises au piège d'une procédure inextricable et pour que l'Oniam ait les moyens de remplir pleinement ses fonctions ?