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Intervention de Olga Givernet

Réunion du mardi 27 juin 2023 à 14h05
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlga Givernet, députée, rapporteure :

. – Le projet de loi de programmation de l'énergie et du climat devrait être examiné par le Parlement à l'automne 2023. Il comportera, pour la première fois, un important volet consacré à la sobriété, aux côtés de mesures concernant les énergies décarbonées et l'efficacité énergétique.

En amont de l'examen de ce projet de loi, le président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale, Jean-Marc Zulesi, a saisi l'Office d'une « étude qui permettrait de présenter et mesurer les implications, en termes de recherche et d'innovation technologique, de l'objectif de sobriété énergétique, et d'avancer des recommandations ».

Le sujet de la sobriété énergétique a surgi dans le débat public avec la présentation, en octobre dernier, du plan de sobriété énergétique préparé par le Gouvernement.

Il s'agissait d'abord de faire face à la situation de crise énergétique en Europe consécutive à l'agression russe en Ukraine, aggravée dans notre pays par la découverte d'un phénomène de corrosion sous contrainte qui a obligé EDF à arrêter certains de ses réacteurs nucléaires. L'Office s'est d'ailleurs penché sur le sujet.

Mais la sobriété n'est pas une idée nouvelle, elle remonte même à l'Antiquité. Dans le monde grec, la tempérance, synonyme de modération ou de retenue volontaire de soi-même, était considérée comme l'une des quatre vertus cardinales.

En revanche, au cours du XVIIIe siècle, les sciences modernes ont fait naître l'idée que les ressources de la Terre pouvaient être facilement exploitées pour obtenir en abondance de l'énergie et des matières premières. La sobriété, devenue moralement scandaleuse, a fini par être perçue comme un signe de misère ou de retard.

Ce n'est qu'à partir des années 1990 que la sobriété est redevenue un sujet d'intérêt pour le monde académique. Pour autant, le concept de sobriété reste encore assez mal défini et pratiquement aucun des interlocuteurs que nous avons rencontrés n'en a proposé une définition identique.

Néanmoins, la définition proposée par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) dans son sixième rapport semble faire l'objet d'un large consensus. Voici sa traduction en français : « La sobriété est un ensemble des mesures et de pratiques du quotidien qui évitent la demande en énergie, matière et eau, tout en garantissant le bien-être de tous dans le respect des limites planétaires. »

Le GIEC ne définit donc pas la sobriété comme un état à atteindre, mais un principe d'action destiné à réduire notre empreinte environnementale, ceci afin de respecter les limites planétaires, tout en assurant à tous une vie décente.

Cette définition fait référence à la théorie dite du « donut », proposée en 2012 par l'économiste Kate Raworth qui définit un « espace sûr et juste » situé entre deux limites : un plafond environnemental définissant les frontières écologiques que l'humanité ne doit pas franchir, et un plancher social, correspondant à la satisfaction des besoins fondamentaux de tous.

La sobriété énergétique est souvent confondue avec l'efficacité énergétique, car elles ont toutes deux le même objectif : réduire la consommation d'énergie. Cependant, les approches sont différentes. Là où la sobriété énergétique permet d'éviter la demande en énergie en réduisant l'appel à certains biens ou services, l'efficacité énergétique vise, en mobilisant l'innovation technologique, à produire des biens ou des services nécessitant moins d'énergie à l'unité. Par exemple, baisser la température du chauffage relève de la sobriété, alors qu'isoler son logement consiste à améliorer l'efficacité énergétique de celui-ci.

Un autre point à garder en tête concerne l'énergie grise. Celle-ci englobe l'énergie totale dépensée pour la production, le transport et la fin de vie d'un produit, mais pas le temps d'utilisation du produit : 75 % de l'énergie totale consommée en France correspond à de l'énergie grise.

Par ailleurs, il est pratiquement impossible de disjoindre la sobriété énergétique de la sobriété en général. L'énergie étant au cœur du fonctionnement de nos sociétés, toute variation dans son utilisation a nécessairement un impact sur les autres consommations.

Il faut aussi noter que la sobriété ne repose pas uniquement sur des comportements individuels, mais également sur un cadre collectif favorisant ces comportements. En effet, la demande en énergie, en biens et en services découle principalement de choix collectifs relatifs aux infrastructures, systèmes d'approvisionnement, régulations et allocations d'usage.

Il est ainsi possible de définir plusieurs niveaux de sobriété. On peut d'abord identifier une sobriété dite « monitorée » qui vise à rationaliser la consommation de ressources sans remettre en question les mécanismes sociétaux et les modes de vie actuels. La sobriété « symbiotique » ensuite, contrairement à la précédente, remet en question les modes de vie et vise à expérimenter des usages plus en synergie avec la nature. Enfin, la sobriété « gouvernée » consiste à réorganiser les infrastructures et les règles de gouvernance qui les régissent.

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