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Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Réunion du mercredi 12 juillet 2023 à 18h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Agnès Pannier-Runacher, ministre :

S'agissant de la refonte du marché de l'électricité, Monsieur Amiel, je rappelle que le coût de l'électricité dans le bouclier énergétique est représentatif, grosso modo, de la réalité du coût du mix électrique, même s'il y a aussi des taxes, le tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (Turpe), etc. Notre objectif est que la réforme du marché de l'électricité fasse en sorte, lorsqu'elle sera mise en œuvre en 2026, lorsque l'Arenh prendra fin, en principe, au 31 décembre 2025, que ce que paient les Français dans le cadre du tarif réglementé de vente de l'électricité (TRVE) minoré du bouclier tarifaire soit équivalent au dispositif qui suivra, afin que cela représente la réalité du coût de notre mix électrique.

Les industriels, qui peuvent prendre des risques, qui peuvent contribuer à l' « effacement » de la consommation électrique et qui peuvent souscrire des contrats de long terme, sur quinze ans, ce qui donne à EDF une assurance dans la durée, peuvent effectivement prétendre à bénéficier des coûts reposant sur des références plus basses. C'est un des enjeux soit d'une négociation sur la base des CFD, soit d'une conclusion directe de PPA. Comme une PME industrielle n'est pas outillée pour conclure un PPA sophistiqué, il est utile d'avoir d'autres formes de contrats, soit des PPA standards soit des CFD.

Pour ce qui est de la prolongation des centrales et de la sanctuarisation des barrages hydroélectriques , Monsieur Tanguy, je vous alerte simplement sur le fait que cela représente aussi beaucoup d'investissements pour préserver les capacités de production. Dans le compte de résultat d'EDF, les financements et la performance opérationnelle permettront, bien sûr, de dégager des marges de manœuvre pour financer le nouveau nucléaire, mais il faudra également financer un certain nombre d'autres objets. S'agissant des barrages, ce sont des décisions prises sans regrets.

Monsieur Roseren, vous avez eu raison de souligner le défi en matière de compétences. Il est absolument majeur : il faudra réaliser 100 000 recrutements dans les dix prochaines années, dont 60 000 dans le cœur des métiers du nucléaire. L'Université des métiers du nucléaire nous a présenté un plan Marshall pour les compétences, que nous sommes en train de déployer. Nous avons ainsi annoncé 40 millions d'euros d'investissements en Normandie pour développer des formations. C'est un sujet qu'il faudra suivre de très près : il faut attirer les talents et les conserver. On constate, en lien avec les rémunérations et l'intérêt pour les métiers exercés, que les gens qui entrent dans ce secteur le quittent assez rarement, mais il faut déjà le connaître. Je précise également que les recrutements auront lieu dans tout le territoire national.

L'Alliance du nucléaire nous permettra de solidifier la chaîne d'approvisionnement, d'échanger des talents – des gens formés sur un chantier pourront se relayer sur d'autres : des synergies sont à créer en la matière –, et de faire monter en compétence toute la chaîne industrielle européenne. Voilà pour le volet industriel et la capacité à réduire les coûts de chaque projet.

Le deuxième élément, s'agissant de l'Alliance du nucléaire, est la réactivation du traité Euratom, en lui donnant sa pleine dimension, notamment pour le financement des SMR, l'accompagnement en matière de taxonomie et le respect d'une neutralité technologique parfaite dans les textes à venir.

Je n'ai pas répondu à Mme Dalloz sur un point : nous construirons un réacteur tous les dix-huit mois s'agissant des deux premières paires et ensuite un réacteur tous les ans, y compris dans l'hypothèse des huit réacteurs supplémentaires – nous prendrons la décision ensemble.

Madame Louwagie, vous avez fait référence à un label centré sur les énergies renouvelables qui a été créé par un gouvernement précédent. Votre question illustre le fait que le monde a changé en cinq ans et qu'il faut en tirer toutes les conséquences.

En ce qui concerne la réorganisation d'EDF, Madame Ferrari, vous avez pu constater que l'objectif du point de vue opérationnel – je ne parle pas des questions actionnariales – était de faire monter en puissance les compétences industrielles dans le pilotage du projet par la séparation de la maîtrise d'ouvrage et de la maîtrise d'œuvre et une responsabilité de conduite de projet et des achats industriels, grâce à un profil qui a vocation à avoir un parcours industriel très fort. On le voit bien dans la manière dont se met en place cette nouvelle réorganisation, l'enjeu de l'excellence opérationnelle et industrielle que nous attendons d'EDF est traité. Nous sommes maintenant dans une phase de préfiguration, et l'objectif est de mettre les meilleures compétences au meilleur endroit, avec la meilleure conduite du projet et des décisions rapides et fluides qui tirent l'ensemble de la filière.

Monsieur Bouyx, les opérateurs d'énergies renouvelables ne sont pas exactement les mêmes, à l'heure actuelle, que les opérateurs du nucléaire. EDF fait les deux et Engie fait du renouvelable et encore un peu de nucléaire en Belgique, mais Total ne fait que du renouvelable et du pétrolier et d'autres acteurs ne font que du renouvelable. La majorité d'entre eux sont autoportants pour leurs projets d'investissement dans le renouvelable. Ils peuvent ensuite choisir de suivre une logique de régulation en allant chercher dans des appels d'offres un prix moyen pour se couvrir pendant la durée de leur investissement. Nous pouvons y être gagnants, mais nous pouvons aussi, de temps en temps, être sollicités au titre du budget. Je rappelle que les énergies renouvelables représentent 30 milliards d'euros de contribution au budget au cours des deux dernières années, ce qui est considérable. Nous finançons ainsi un bouclier énergétique qui n'a pas d'impact sur notre trajectoire de finances publiques – c'est une réforme du marché de l'électricité avec des moyens un peu frustes mais efficaces. Du côté du nucléaire, un CFD permet de sécuriser les investissements de l'opérateur en lui garantissant un prix sur la durée, quel que soit le prix du marché, sur la base de la réalité des coûts dès lors qu'il assure opérationnellement l'excellence industrielle qu'on attend de lui. C'est la logique et la raison de retours sur investissement très importants.

Monsieur Laisney, il me semble que le rapport sur la sûreté nucléaire que vous avez évoqué a été très largement adopté par les membres de l'Opecst, et je peux vous confirmer que l'État va s'en saisir : il va l'analyser et nous vous ferons savoir très vite les suites que nous comptons lui donner. En tout cas, l'objectif du Gouvernement, comme je l'ai déjà indiqué à plusieurs reprises, est de renforcer la sûreté nucléaire. Je me bats avec Bruno Le Maire pour avoir des moyens supplémentaires en la matière – mais je vous rassure, il ne s'agit pas de bataillons de 500 personnes.

Nous devons renforcer la sûreté nucléaire en créant des équipes consacrées aux AMR et aux SMR ainsi qu'au réchauffement climatique, car il faut traiter tous les dossiers. L'enjeu est de faire travailler ensemble tout le monde – je crois que les rapporteurs ont proposé de retenir un nouveau nom – au service de l'excellence en matière industrielle, opérationnelle et de sûreté, c'est-à-dire au service des Français.

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